[ Analyse ] L'Otan ou Jurassic Park
Pour des raisons de basse politique interne, Washington est prête à faire monter la pression sécuritaire en Europe. La catastrophe ukrainienne? La faute de la Chine...

Disposant de la présidence tournante de l’UE, le premier ministre hongrois Victor Orban multiplie les initiatives diplomatiques. Ses visites à Kiev, à Moscou et à Pékin, même si effectuées au seul nom de la Hongrie, Etat souverain, ont mis en rage tout ce que l’Europe compte d’atlantistes rabiques (ça fait du monde). On peut difficilement donner tort à Viktor Orban quand il affirme que ce n’est pas en restant le derrière posé dans son fauteuil qu’on créera les conditions de la paix. Viktor Orban, ce renégat, “ un chat sous méthamphétamine” ose écrire Politico…
Résultat des courses ? Certains idiots congénitaux menés par les USA et l’Allemagne (coucou Manfred Weber) travaillent la bave aux lèvres à écourter la présidence tournante hongroise, ce qui est contraire aux traités. Les institutions européennes, Commission en tête, n’en sont plus à une tentative d’abus de pouvoir près. Prenez par exemple ce qui a été présenté comme le contournement du veto hongrois dans l’affaire du transfert à l’Ukraine des revenus des actifs russes gelés. Pas du ressort de l’UE puisque ces actifs sont détenus par les banques centrales de chaque Etat membre. La décision de les geler et d’en distribuer le produit à Kiev n’est pas européenne, mais nationale. L’UE, c’est Esope et Jean de La Fontaine, la fable de la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf.
Même réaction hystérique suite à la tribune parue dans le Financial Times signée par une cohorte de diplomates et d’analystes chevronnés, vrais experts de la Russie, dont la rédaction a été coordonnée par l’excellent journaliste Thomas Fazi.
Le sommet des 75 ans de l’Otan qui s’est tenu a Washington ? Une énième sinistre farce où l’on vient de mettre d’accord sur ce que Washington a déjà décidé. Au son d’un discours parfaitement lunaire de Joe Biden (qui n’est pas sénile mais souffrirait plutôt de la maladie de Parkinson comme nous le disons depuis 2020), le déploiement des capacités de frappe à longue portée américaine en Allemagne à partir de 2026 a été entériné. De manière bilatérale. Ni Washington ni Berlin n’ont demandé leur avis aux autres membres de l’alliance atlantique. Par conséquent, l’Allemagne décide unilatéralement d’exposer l’Europe entière à un risque de frappe nucléaire sinon inexistant. Et dire qu’Emmanuel Macron voulait mettre la dissuasion française au service de l’Europe… Nous avons montré que cela équivaudrait à une dissolution nucléaire.
Point intéressant cela dit, qui illustre qu’en matière de dissuasion, le vecteur compte plus que la charge militaire. L’Iran, les Houthis et le Hezbollah en font la démonstration depuis 9 mois.
Bref, c’est retour aux euromissiles. Régression de quarante-cinq ans. Déjà à l’époque cela avait provoqué une hostilité telle dans les opinions publiques européennes que les Américains avaient remballé leurs missiles Pershing et négocié en 1987 le traité sur les forces nucléaires intermédiaires - traité que Donald Trump, très mal conseillé, a décidé de dénoncer en 2019. Signe que la guerre en Ukraine était planifiée, dans les faits depuis au bas mot 2008.
Si les “zinzins du sous-sol” (c’est comme cela que le président G. H. Bush, le père, surnommait les néoconservateurs) grésillent du trolley, cela ne veut pas dire qu’ils ne sont pas intelligents. La stratégie du “blob” washingtonien – de l’Etat profond diront certains – ne consiste pas à créer une nouvelle guerre froide comme on l’entend trop. Ils savent que la guerre en Ukraine est perdue et qu’ils n’ont pas réussi à affaiblir la Russie. Ils ont également pleine conscience de s’être pris un énorme “blow-back”, un gros retour de manivelle puisqu’ils ont renforcé l’alliance sino-russe au delà des espérances les plus folles qui avaient cours à Moscou et à Pékin avant le début du conflit russo-ukrainien. Un échec stratégique monumental qui n’est pas passé inaperçu du reste du monde.