[ Analyse ] Sic transit gloria mundi ad Ucrainam
Un empire se reconnait à ce que sa politique extérieure n'est que préoccupation de politique intérieure. L'Américain et l'occidental s'effondrent, quelque part entre Kiev et Lougansk.


Il ne vous aura pas échappé que l’énorme machine médiatique qui s’est mise en branle depuis le début de la semaine dernière à l’occasion du “un an” de l’invasion russe de l’Ukraine n’a qu’un seul but : faire croire aux électeurs américains que l’Ukraine gagne la guerre et que Joe Biden est un grand leader. Grand leader qui refuse de se rendre à la frontière Sud du pays, en proie à la plus grave crise migratoire de l’histoire des Etats-Unis. Grand leader qui refuse de se rendre à East Palestine, Ohio, localité victime de la pire catastrophe environnementale de ces vingt dernières années.
Il faut avouer que les néoconservateurs et le proverbial “Etat profond” n’ont pas d’autre option réaliste que Joe Biden pour 2024. Ces joueurs de petits chevaux ne peuvent miser que sur le vieux cannasson sur le retour. L’électorat du parti républicain leur est aujourd’hui aussi hostile qu’interdit d’accès, les RINOs (Republicans in name only, ceux qui n’ont de républicain que le nom) étant en voie d’extinction.
Les immenses turpitudes du conglomérat Washington - Wall Street - Gafam étant exposées par les commissions d’enquête parlementaires en cours sur la censure des plateformes à la demande de l’Etat et la politisation des agences fédérales, la panique règne. Les médias “mainstream” et les réseaux sociaux s’étant définitivement décrédibilisés en assénant des années durant les mensonges du Russiagate, en manipulant une élection par la censure d’informations vérifiées mettant en lumière la corruption de la famille Biden, en s’évertuant à ce que le public ne puisse bénéficier d’information valides et factuelles sur la Covid, les leviers de manipulation sont inopérants.
L’économie américaine est au bout de la rotative à billet, une partie croissante du commerce mondial se désoccidentalisant et se dédollarisant à toute vitesse. Il est de plus en plus dur de vivre à crédit sur le dos du reste du monde.
L’establishment américain sait que si son candidat n’est pas réélu, c’est la fin. La purge sera inévitable. A moins de la sécession de certains Etats dont certains commencent à parler sérieusement, donc d’une guerre civile. Ou bien, afin de conserver le pouvoir comme le fit un Roosevelt aussi corrompu que malade et diminué, à moins d’une guerre mondiale.
Un ballon chinois, une manipulation qui a déjà explosé au visage de l’administration Biden, ne suffira pas pour détourner l’attention des Américains de leurs problèmes – inflation, récession, immigration et criminalité hors de contrôle. Ils sont bien réels et étrangers à la guerre en Ukraine.
Mais quel est ce chenu vieillard si fort qui reste impavide quand, à Kiev, l’alerte aérienne résonne, pathétique mise en scène ? Quel est cet exceptionnel cacochyme qui dans les faits a du demander l'autorisation à la Russie pour aller se faire filmer avec Zelensky lors d’une visite surprise qui n’a surpris personne ? Sans l’accord et les garanties de Moscou, qui contrôle l’intégralité de l’espace aérien ukrainien, pas possible d’aller caresser le loulou de Ruthénie. D’ailleurs, ce vieillard n’est-il pas reparti vers la Pologne en train, non pas dans Air Force One, le Boeing présidentiel ?
Les serins médiatiques reprennent tous en chœur l’éculé refrain.
La machine à débiter des mensonges, à manufacturer les perceptions, est en train de couler une bielle. La guerre n’est pas plus une question de perception qu’une balle dans la tête est un sentiment. Sa réalité militaire, économique et politique est plus prégnante que les exhortations médiatiques à déconsidérer l’évidence.
Le quai d’Orsay, toute honte bue, où tout est perdu surtout l’honneur, nous invite à embrasser une psychose, un délire paranoïaque qui n’est pas sans rappeler les méthodes qui présidèrent au “traitement” de l’épidémie de Covid. Ceux qui nous dirigent ont perdu depuis longtemps toute appréhension de la réalité, toute préhension sur la réalité. C’est la compétence nécessaire et suffisante pour accéder aux arcanes du pouvoir, semble-t-il.

La réalité, nous la connaissons.
La Russie n’a subi que peu d’échecs tactiques, puisqu’elle a détruit deux armées ukrainiennes. Celle de février 2022, professionnelle entraînée et équipée à ses standards huit ans durant par l’Otan, forte de 450 000 hommes. Celle reconstituée à partir d’avril 2022 par l’Otan. Et la troisième armée résultant de la douzième mobilisation, agglomération de pauvres hères et de gamins inconscients, autant de tremblantes chairs à canon, est méthodiquement et patiemment anéantie.
L’Ukraine, pays de 37,5 millions d’habitants avant la guerre, en a perdu plus de 10 millions en un an. Le “taux de change” est de plus de dix soldats ukrainiens tués pour un russe tombé. Soutenir une guerre telle que celle se déroulant dans le Donbass lui est impossible. Une guerre continentale n’est que masse et puissance de feu. L’Ukraine ne dispose ni de l’une, ni de l’autre.
Les arsenaux de l’Otan sont vides. L’industrie de l’armement occidentale est incapable de faire face aux “besoins” de l’Ukraine, a déclaré Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Otan. Les Américains ne peuvent produire que 20 000 obus de 155mm par mois alors que l’Ukraine en tire 3000 par jour. Ils en sont réduit à taper dans les stocks prépositionnés en Corée, en Israël et dans leurs plus de 800 bases qui encerclent le monde.
Les Ukrainiens, incapables de manœuvrer depuis le début du conflit, on tiré sept années de stocks de missiles anti-char Javelin, sans aucun effet sur le champ de bataille. Le délai de production d’une roquette Himars est de plus d’un an. Celui d’un missile antiaérien Nasams de 32 mois. La capacité de production des missiles du système Patriot, inefficace, complexe et fragile, se monte à 250 munitions par an. L’Arabie Saoudite doit supplier ses voisins de lui en vendre afin de remplacer celles qu’elle a tirées contre les drones Houtis. Raytheon, le fabriquant, n’arrive pas à pourvoir à la demande.
L’armée française, la plus puissante de l’Union européenne, n’a aujourd’hui pas les moyens de tenir un jour en cas de conflit de haute intensité sur notre territoire national. Nos pilotes de combat n’ont pas les 180 heures de vol réglementaires faute d’appareils. Reste à savoir qui donc pourrait bien avoir l’idée saugrenue d’envahir la France ? A part, bien entendu, ceux qui ont saboté les gazoducs Nordstream, dans l’éventualité où le peuple français déciderait de reprendre son destin en main en faisant un sort définitif à ceux qui depuis trente ans le poussent vers l’abîme…


Certains affirment que si la Russie sait pousser, elle ne sait pas percer. Ils sont oublieux du fait que la Russie a su percer en infériorité numérique de 1 à 4 de février à juillet 2022. Son objectif était alors d’obtenir la neutralisation de l’Ukraine à la table des négociations. Sans l’intervention des USA, de l’Angleterre, de l’Allemagne et de la France qui ont ordonné à Zelensky de rompre les négociations alors qu’elles étaient en passe d’aboutir, la manœuvre aurait réussi. La destruction de l’Ukraine et des centaines de milliers de morts auraient été évités.
D’où, l’été dernier, la mobilisation partielle, et les plus de 80 000 volontaires. D’où la masse de manœuvre russe considérable de près de 700 000 hommes prête non pas à déferler pour percer une brèche dans les lignes de défense ukrainiennes, mais à pousser en tous points afin qu’elles cèdent au même moment, accompagnée d’une manœuvre qui coupera Kiev de ses lignes d’approvisionnement avec la Pologne. Ce n’est que par l’effondrement simultané de l’ensemble de la digue que la Russie réalisera son objectif de guerre : la démilitarisation et la neutralisation durable de l’Ukraine.
Résultat que la Russie tôt ou tard obtiendra. En ayant au surplus littéralement désarmé l’Otan et montré au reste du monde combien les USA et ses alliés étaient en vérité faibles. Victoire stratégique dont les effets sont irréversibles. La différence entre des joueurs d’échec et des joueurs de petits chevaux ? La voilà.
Quant au scénario des deux Corées (pas d’accord de cessez-le-feu ni de traité de paix, zone démilitarisée), il reste peu vraisemblable pour quatre raisons. Les forces en présence ne sont pas équivalentes ni en masse ni en puissance de feu, et la Russie est une puissance nucléaire disposant d’une profondeur stratégique dont aucune deux Corées ne disposaient malgré l’aide étrangère ; la Russie ne cherche pas à conquérir l’Ukraine ni à la rayer de la carte mais à anéantir durablement son potentiel militaire ; les dommages infligés à l’Ukraine sont déjà tels que les Russes sont tranquilles pour une génération ; le reste du monde ne se préoccupe pas du conflit ukrainien, l’inefficacité des sanctions le démontre.
Et tout ça pour quoi?