[ Edito ] Travesti de justice
La condamnation de Donald Trump n'y fait rien. Il continue de caracoler confortablement en tête des sondages. Cette affaire porte cela dit bien au-delà du candidat républicain.
Ceux qui, tels Libération et la journaliste Sonia Devillers (qui présente la matinale de France Inter et qui, avec sa patronne Adèle van Reeth, a revendiqué de ne pas inviter les personnes qui pensent mal), se réjouissent des trente-quatre condamnations de Donald Trump, sont d’ignares et de dangereux idiots. Il s’agit de bien plus que de sa simple personne ou du candidat, qu’on a le loisir d’apprécier ou pas.
Note de la rédaction: nous avons bouclé cet article à 14 h 30 pour une publication à 18 heures, mais nous avons eu la chance de pouvoir attraper à la volée, en urgence et presqu’à l’insu de son plein grès, Renaud Beauchard.
Avocat résident aux USA depuis plus de vingt ans que nous avons déjà eu le plaisir d’interviewer par deux fois, Renaud Beauchard a notamment écrit dans les colonnes de Marianne et du Figaro. Nous avons donc retardé la publication de cet édito, afin de partager son interview. Vous verrez que l’analyse que Renaud Beauchard effectue les deux pieds dans le marigot de Washington D.C. ne diffère pas tant de la nôtre, à laquelle il rajoute cependant des éléments qui font d’un point de vue judiciaire froid dans le dos. Vous la trouverez au bas de l’article en format audio.
A écouter également. Renaud Beauchard : “Les démocrates remporteront l'élection présidentielle en fraudant massivement"
Quand un procureur, un juge et grand jury plient la loi afin d’obtenir des condamnations, il n’est plus question de justice mais qu’inquisition. Cela vaut pour n’importe qui. On ne juge plus les actes commis par un individu mais sa seule personne. Effondrement total du principe sur lequel est fondé toute démocratie, celui de l’état de droit. Pas sa version bruxelloise qui consiste asséner que le peuple ne peut jamais remettre en cause l’ordre établi. Le vrai état de droit, celui qui veut que la loi est la même pour tous et s’applique de la même manière à tous, selon son état au moment du lancement des poursuites contre les faits incriminés.
La campagne de 2016 d’Hillary Clinton ne s’est-elle pas vue infliger 100 000 dollars d’amende pour les mêmes faits que ceux reprochés à Donald Trump, à savoir avoir comptabilisé de manière frauduleuse une dépense au mauvais poste ?
Il s’agissait en l’espèce de la facture du fameux dossier Steele, une fabrication réalisée par un ancien du MI6 (le service de renseignement extérieur britannique) dans lequel était avancé que le Kremlin détenait du Kompromat sur Donald Trump impliquant notamment une suite dans un grand hôtel moscovite, des prostituées et des pratiques scatologiques.
Ce rapport déclencha le “Russiagate” qui empoisonna plus de la moitié du mandat de Donald Trump et mena à la nomination du procureur spécial Robert Muller, dont l’enquête l’exonéra de toute collusion avec Moscou.
Les honoraires de Fusion GPS, l’officine employant Christopher Steele, avaient été payés par l’entremise d’une société d’avocats elle-même travaillant pour le parti démocrate et comptabilisés comme des frais juridiques. Or la rédaction de ce rapport de relève pas d’une prestation de services juridiques. L’organisation de campagne d’Hillary Clinton avait son siège social à Brooklyn, NYC. Elle était donc soumise aux mêmes lois que celle de Trump, celles de l’Etat de New York, en vertu desquelles l’ancien président est aujourd’hui poursuivi.
Pourquoi Hillary Clinton n’a -t-elle pas été l’objet de poursuites pénales ?
D’autant qu’il est également établi que son organisation de campagne a financé le hacking du serveur de celle de Trump afin de fabriquer d’autres allégations mensongères, celles de liens avec la banque russe Alpha Bank et de l’intrusion du Kremlin dans le serveur du Comité national démocrate en vue de peser sur l’élection. Comme le dossier Steele, a bunch of Baloney, tout était faux. Ce qu’a commis la campagne d’Hillary Clinton est dans les faits pire que le scandale du Watergate qui mena à la démission de Richard Nixon.
La subversion du système judiciaire à des fins politiques est aboutie et n’a pas échappé à la majorité des Américains. Un procureur politisé a demandé et obtenu la constitution d’un grand jury. C’est la version américaine du juge d’instruction sauf qu’il s’agit d’un jury populaire présidé par un juge dont le rôle est de diriger de manière contradictoire et secrète l’enquête au terme de laquelle sera décidée de la mise en examen du justiciable visé et de la nature des incriminations. La perversité du procédé laisse sans voix : dissimuler la nature strictement politique de procédures pénales derrière un jury populaire...
Les faits reprochés à Donald Trump, datant de 2016, sont prescrits. Les procédures n’ont aucun fondement juridique puisqu'aux USA et dans l’Etat de New York, comme en France, les termes d’un contrat sont libres. Ce n’est que lorsque ces termes enfreignent des dispositions légales existantes que le contrat peut être annulé par la justice.
Verser une somme d’argent à l’ancienne actrice X Stormy Daniels pour qu’elle garde pour elle la relation extra-conjugale qu’elle aurait eue avec Trump ne constitue pas un délit. Ce genre de chose est monnaie courante, en France aussi. C’est le fondement des protocoles transactionnels qui tous comportent des clauses de confidentialité, parfaitement licites à moins de relever par exemple de la subornation de témoin dans le cadre d’une enquête judiciaire en cours.
Cette somme ayant été payée par l’intermédiaire de l’avocat de Trump, Michael Cohen, elle a été comptabilisée comme frais juridiques, ce qui est certes irrégulier mais ne constitue en rien une tentative d’influer par des moyens illégaux sur l’issue du scrutin de 2016. Cette infraction, déjà prescrite au moment de l’enclenchement des poursuites, donne lieu à une contravention, à une amende dont le montant est décidé par un juge.
La théorie juridique - c’est de ce dont il s’agit, d’une théorie développée par un procureur dans le but express d’obtenir une condamnation - ne tiendra pas une seconde devant une cour d’appel et encore moins devant la Cour suprême, d’autant que le corps du délit - les 130 000 dollars versés à Stormy Daniels - ne provient pas des comptes de campagne de Donald Trump. Alors que les honoraires réglés à Fusion GPS le furent des comptes de campagne de Hillary Clinton et délibérément maquillés en frais d’avocats.
La prison ? On le saura le 11 juillet (4 jours avant la convention républicaine) lors du prononcé du jugement et de la peine. Donald Trump dispose d’un casier judiciaire vierge, c’est donc peu probable. Reste à savoir si le juge est lui aussi politisé et sera déraisonnable au point de placer Trump sous écrou alors qu’il caracole toujours en tête des sondages et que son placement en détention dans ce qui n’est qu’un travesti de justice risque de provoquer de sérieux troubles civils, ce qu’escompte bien l’administration Biden.
Pour l’écrasante majorité des Américains à qui nous avons parlé, la corruption du parti démocrate est aussi patente que vertigineuse. N’est-ce pas l’administration Obama qui demanda et obtint des mandats FISA pour mettre sous surveillance électronique comme physique des conseillers de Trump dès 2015, dévoyant ainsi des moyens fédéraux à des fins politiques? Entre deux maux, il faut choisir le moindre : il semble aujourd’hui que Donald Trump sera élu en novembre prochain, même derrière les barreaux.
Ecoutez ce qu’en dit Renaud Beauchard.
Mise à jour le 11/06/2024. L’analyse de Jed Rubenfeld, professeur de droit constitutionnel à Yale, qui expose l’irrégularité fondamentale du procès de Donald Trump: l’accusation l’a mis en examen pour un délit qui n’a jamais été caractérisé ni dans l’ordonnance de renvoi devant la cour ni durant le procès. En clair, Trump a été accusé d’un délit sans que le parquet ne dise lequel… Tenter d’influencer une élection ne peut être une infraction puisque tout candidat à une élection cherche à l’influencer en sa faveur: cela s’appelle une campagne électorale.