Electriques pénuries : les capacités de stockage dans le noir
En 2021, un article alertait sur les limites des capacités de stockage. Et de l'impossibilité du 100 % renouvelable, scénario pourtant brossé par RTE. Mais qui lit ces études ?
A l'heure où l'on nous parle de coupures d'électricité, où des circulaires sont envoyées aux préfets pour préparer aux éventuels délestages pour éviter le black-out, où l’on se fait fort aussi d’alterner le chaud et le froid (voir la grosse colère d’Emmanuel Macron vis à vis de scénarios jugés absurdes et la cacophonie générale), on peut légitimement se demander comment on a pu en arriver là. Comment la France, où le KWH est le moins cher d’Europe et le plus décarboné, a échoué à faire perdurer un modèle efficace. Comment l’Hexagone en est arrivé à trôner parmi les pays européens les plus à risques de pannes cet hiver, comme le souligne un récent rapport du réseau européen des gestionnaires de réseau de transport d’électricité.
On l’a vu et entendu durant les premières auditions qu’a mené la commission d’enquête parlementaire visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et l'indépendance énergétiques de la France. L’audition notamment de Jean-Marc Jancovici. Et surtout celle de Yves Bréchet, ancien haut-commissaire à l'énergie atomique, passée quasi-inaperçue dans les médias et à retrouver ici:
Mis au ban en France depuis trente ans, au point de ne plus être jugé que comme une énergie de complément, le nucléaire fait son retour sur le devant de la scène à la faveur de la guerre en Ukraine. Une scène que les énergies “renouvelables” entendent bien monopoliser elles surtout.
Entendons-nous bien. Comme la Covid n’est pas responsable, seulement le révélateur, de la dégradation de notre système de santé, la guerre en Ukraine et l’une de ses conséquences, l’augmentation géométrique du prix de l’énergie, n’est pas à l’origine du délitement de notre système énergétique, seulement un accélérateur. Qui met en lumière le trou énergétique laissé par un nucléaire rendu moribond que les énergies renouvelables ne peuvent – et c’est juste factuel – pas compenser malgré tous les programmes de subventions déployés.
Par-delà le constat d’un total abandon des pouvoirs publics français, et notamment auprès des instances européennes, de la filière nucléaire, il est édifiant de voir que des dizaines de rapports scientifiques, pourtant commandés, n’ont pas été pris en compte. Et même vraisemblablement pas lus. Edifiant de découvrir le manque de connaissance de politiques manifestement drivés par des conseillers et hauts fonctionnaires qui font en la matière la pluie et le beau temps (sans jeu de mots). Voir à ce titre l’audition de Yves Bréchet.
Edifiant que voir que la conduite de la politique énergétique, hors de toute stratégie industrielle à long terme, s’est bornée à suivre celle empruntée Outre-Rhin dans une grande coalition socialo-écologiste, en premier par Gerhard Schroeder, militant de l’interdépendance gazière, notamment avec la Russie (il a siégé au conseil d’administration de Gazprom jusqu’au début de la guerre en Ukraine) aidant grandement Poutine à ouvrir ou fermer le robinet de gaz sur le continent.
Edifiant de voir aussi la part prise par la communication, quand il ne s’agit pas de désinformation. Réécouter à ce titre Marine Tondelier sur France Info le 11 septembre, accessoirement favorite pour succéder à Julien Bayou à la tête d'EELV. On rappellera que les écologistes se sont construits dans les années soixante autour de l'anti-nucléarisme.
“ Grenoble fonctionne à 100% à l'énergie renouvelable. Vous allez me dire, il y a des montagnes, c’est facile. Mais la France est une grande nation géographique, il y a des fleuves, des montagnes, des façades maritimes, du vent, du soleil, plein de manières de faire ».
C’est beau. Mais c’est faux. Ou trompeur. Ou réducteur. La Ville de Grenoble ne fonctionne pas à 100 % à l’énergie renouvelable. Tout au plus peut-on dire que Gaz Electricité de Grenoble (GEG), l’électricien du crû, vise le 100 % renouvelable fin 2024. Et que cette énergie produite par GEG est injectée dans le réseau national. Une énergie verte qui n’est pas plus locale non plus comme pourraient le laisser croire les propos de l’élue écolo, GEG tirant sa production d’un peu partout en France et jusque dans des éoliennes dans les Hauts de France.