[ Propulsion anti-nucléaire ] Marine Tondelier, chantier médiatique
La presse parisienne a sa nouvelle coqueluche. Secrétaire nationale d’EELV, Marine Tondelier a été propulsée première ministrable. Et tant pis si elle s'est prise une veste à ces législatives...
Le voyez-vous venir cet échaudage médiatique monté au soir du second tour des législatives anticipées ? Qu'importe que son parti, EELV, eût remporté un petit 5,5 % des suffrages exprimés aux élections européennes. Qu’importe qu'en Europe, les écologistes aient perdu un quart de leurs élus au parlement européen. Qu'en Suisse, les Verts soient dans la panade. Qu'en Finlande, en Suède ou aux Pays-Bas, des partis anti-écolos ont prisle dessus, qui se sont constitués contre les politiques environnementales gouvernementales.
Qu'importe qu'en France, EELV, en la personne de Yannick Jadot, se soit viandé au premier tour de la présidentielle en 2022 (4,63 % des voix). En 48 heures, Marine Tondelier a, par la magie d'on ne sait quoi - à part une veste verte - été érigée au rang de première ministrable. La veste, Marine Tondelier l’a prise dans la circonscription où elle était suppléante de Samira Laal. Eliminée dès le premier tour.
La secrétaire nationale des Ecologistes (anciennement Europe Ecologie Les Verts) ne vient pas de nulle part. Marine Tondelier a un petit bout de carrière politique : elle est conseillère régionale des Hauts de France depuis 2021. Elle est aussi conseillère municipale d'opposition depuis 2022. Mais pas n'importe où : à Hénin-Beaumont, ville dirigée par le RN Steeve Biois, qui vient d'écoper en première instance de six mois de prison avec sursis et de 10.000 euros d'amende pour avoir écrit une préface dans un guide pratique édité avant les municipales de 2014 recommandant la priorité nationale dans l'accès aux logements sociaux.
Ça tombe bien, Marine Tondelier a fait de la lutte contre l'extrême droite son deuxième cheval de bataille (le premier, c'est l'écologie). Elle en a même fait un livre : Nouvelles du Front, sorti en 2017, qui dénonce la gestion… d' Hénin-Beaumont. Ce qui restreint tout de même sacrément le champ d'investigation.
Les habitants d'Hénin-Beaumont, eux, ne voient pas où est le problème. En 2020, la liste du maire sortant, Steeve Biois, a remporté 74,21 % des voix, celle de Marine Tondelier 18,22 %.
Peu importe. Depuis quelques jours, Marine Tondelier est partout. Surtout dans les médias, transformés en parfaits petits télégraphistes. "Marine Tondelier, la “vraie Marine d'Hénin-Beaumont" qui mène la campagne pour les écologistes" (BFM); "Marine Tondelier, figure montante du Nouveau Front populaire" (BFM encore); "Comment l'écologiste Marine Tondelier s'est imposée comme une nouvelle tête à gauche" (France Info); "Qui est Marine Tondelier, dirigeante des Verts et pourfendeuse de l'extrême droite ?" (EuroNews); "Marine Tondelier, la figure du Nouveau Front populaire qui fait reculer Jordan Bardella" (France 24); “Marine Tonnelier s’impose en figure politique centrale” (Le Monde), etc
Parce que le barrage contre le RN, c'est elle. La preuve : elle a coupé avec une rare élégance le sifflet à Jean-Philippe Tanguy (“on comprend rien ce que vous dites”, “notre mandat est d’apaiser” (sic)) et Jordan Bardella a refusé le débat dans l'entre-deux tours, disant lui préférer Mélenchon. Conclusion radicale pour l'écolo : le leader du RN est sexiste. Que les écologistes soient le troisième parti du Nouveau Front populaire et ne sont donc aux yeux de Bardella pas "représentatifs" – ce qui n'est certes pas très sympathique mais pas sexiste – est un détail pour Marine Tondelier.
Mais c'est aussi un détail pour les médias qui, à quelques exceptions près (Radio France notamment), ont repris sans trop sourciller les accusations aussi fallacieuses que caricaturales de sexisme de la secrétaire nationale des Ecologistes. Dans le jargon de la profession, on appelle cela "passer les plats".
Pas un n’a mentionné la claque qu’a pris Marine Tondelier sur sa circonscription pour ces législatives 2024, dont certes elle n’était que la suppléante : face à Marine Le Pen, Samira Laal a été sèchement éliminée (26 % contre 58 % des voix). Depuis 2014 et son entrée sur la scène électorale, l’écologiste a toujours essuyé les défaites, que ce soit sur sa commune d'Hénin-Beaumont (où elle siège dans l’opposition), sur son canton, à la Région (où elle siège dans l’opposition - union de la gauche) ou sur sa circonscription.
Broutilles que tout cela. A Washington, la journaliste franco-américaine Laurence Haïm ne s’est pas faite prier pour faire la promo dans un mauvais anglais de la nouvelle égérie érigée au rang de “star française de la gauche”. The new french star of the left”. (Mme Haïm, c’est “The new star of the French left” en anglais).
A quand le “Tiny desk concert” de Marine Tondelier sur NPR ?
(DOMi est française)