LancetGate, LegaGate... Ceci n'est pas de la science
Vous croyez que les ministres et les experts prennent des décisions sur des bases scientifiques ? Retour sur le LancetGate où, quatre ans après, aucune sanction ou leçon n'a été prise ou tirée.
Du scandale du LancetGate, du nom de cette étude frauduleuse mettant en cause l’hydroxychloroquine dans sa réponse au SARS-CoV-2, que reste-t-il ? Rien. Aucun sanction n’a été prise contre qui que ce soit, aucune enquête n’a, si ce n’est été diligentée, abouti à quoi que ce soit. Sapan Desai, le fondateur de Surgisphère, la société disparue depuis qui a fourni les données litigieuses, a été interdit d’exercer la médecine, mais dans le seul Etat de l’Ohio, et cela n’a rien à voir avec l’étude bidon…
LancetGate, LegaGate, même topo ? Même problématique sur les données. Même éditeur scientifique aussi, Elsevier, le plus gros au monde, qui a comme actionnaires Vanguard et BlackRock, et à qui appartient The Lancet.
Nous republions, avec l’accord de son auteur Pascal Clérotte, l’article paru le 30 mai 2020 dans le Groupe d’analyse métropolitain, et qui éclairait les dessous d’un scandale, également mis à jour par France Soir, scandale qui aurait dû logiquement conduire à des poursuites pénales.
Vous croyez que les ministres et les experts membres d’aréopages prennent des décisions sur des bases scientifiques ?
Vous repasserez.
Avant de poursuivre, prenez le temps de lire notre premier billet sur le LancetGate.
La faillite en matière de prise de décisions – mauvaises décisions prises de la mauvaise manière par les mauvaises personnes selon les mauvais processus – au plus haut sommet de l’État est patente.
Dernier exemple en date : le décret interdisant l’hydroxychloroquine veut-on nous faire croire alors qu’il n’interdit rien du tout, pas plus que le précédent décret d’ailleurs.
Cette décision a été prise sur la base de ce que nous pouvons, avec les éléments publics dont nous disposons aujourd’hui, considérer comme une escroquerie et un abus de confiance.
De très très gros doutes planent sur la validité des données utilisées pour pondre la fameuse étude dans The Lancet qui met à mal la possible efficacité de la bi-thérapie Raoult, HCQ+AZ. Ces données ont été fournies pas Surgipshere, société dont le patron est l’un des auteurs de l’article incriminé.
Surgisphere affirme que ces données sont extraites de dossiers médicaux électroniques anonymisés.
Surgisphere poursuit en expliquant que les accords avec les clients auxquels ils fournissent le système Quartz Clinical les autorise à “aspirer” des données des dossiers médicaux et à les inclure dans sa base de données globale.
Il y a donc très clairement une transaction non seulement entre Surgisphere et ses clients pour la fourniture de produits et services, mais il y en a également une entre les clients et Surgisphere, puisque les clients lui fournissent des données médicales d’une valeur bien plus importante dans les faits que la plateforme logicielle de Surgisphere. D’autre sources de données sont les cabinets des praticiens libéraux et des laboratoires d’analyses médicales privés qui rentrent leurs données dans la base de Surgisphere.
Au Canada, dans tous les pays de l’Union européenne, Royaume-Uni compris, en Australie et dans certains Etats des USA et sans doute dans pas mal d’autres pays/régions du monde, cela relève du juge pénal. Il est illégal et c’est une délit que d’extraire des données de dossiers médicaux, les données appartenant à chaque patient. Nul ne peut les utiliser sans leur consentement.
Voici ce qu’en France la CNIL en dit.
C’est à dire que les dirigeants de Surgisphere, mais également tous les directeurs d’hôpitaux ayant conclu un accord avec Surgisphere ainsi que les praticiens ayant renseigné la base de données sont susceptibles dans le meilleur des cas de perdre le droit d’exercice de la médecine et dans le pire de finir en prison pour abus de confiance, non-respect du secret professionnel etc.
Il semble donc que le mode d’acquisition des données invalide l’étude de Mehra et al., qui semble à son tour avoir été conduite en dépit de la plus élémentaire déontologie.
Passons maintenant à ce que nous savons de Surgisphere et de sa direction.
Nous allons là nous livrer à un exercice de criblage basé sur ce qui est disponible sur internet.
Attention, il ne s’agit pas d’une enquête administrative, judiciaire ou journalistique. Nous mettons en contexte des faits, ce qui nous conduit à poser un certain nombre de questions, auxquelles nous n’avons pas les réponses. Mais les doutes qu’instillent ces questions sont tels qu’il n’y a plus doute : l’étude publiée par The Lancet ne peut en aucun cas être utilisée comme base de prise de décision.
Sapan S. Desai est un vrai docteur en médecine, chirurgien cardio-vasculaire. Il est également titulaire d’un MBA (tenez, comme Olivier Véran, médecine + école de commerce).
Il a en une dizaine d’années publié plus de 165 articles de recherche médicale et écrit plusieurs manuels de chirurgie cardiovasculaire, des “clinical reviews” y compris en psychiatrie (wtf?)
Cent soixante cinq articles recensés sur Researchgate et six manuels en vente sur Amazon.
Oui, certaines personnes ont des capacités de travail bluffantes, oui le mandarinat en médecine permet de mettre son nom sur des ouvrages qu’on s’est contenté de relire (et encore). En revanche, occuper concomitamment des postes de direction administrative, d’enseignement et de recherche, avoir une pratique privée et publier tout ça tout en gérant une entreprise, ce n’est juste pas humain. C’est juste impossible.
Depuis la fin de sa spécialité de chirurgie cardio-vasculaire, le Dr. Desai n’a pas conservé un poste plus de deux ans alors que la recherche médicale est une entreprise de long terme.
Question : les sommités de la recherche médicale aux USA étant payées à prix d’or, comment se fait-il qu’aucune institution n’a réussi à retenir le Dr. Sapai ?
Tout d’abord, bien lire ce rapide tour d’horizon fait par France Soir. Il apparaît que les informations disponibles sont très lacunaires pour une société ayant prétendument pignon sur rue.
Surgisphère est présentée comme faisant partie d’un “écosystème” comprenant par exemple Surgical Ouctomes Collaborative organisation via laquelle auraient été collectées les données de soins courants de plus de 1200 hôpitaux dans le monde; Quartz Clinical, qui serait l’éditeur d’un progiciel décisionnel (tableaux de bords) dédié aux hôpitaux etc.
Quand on y regarde de plus près, on se rend compte que c’est exactement la même chose, qu’il n’est question que de tableaux de bord de gestion, ce qui existe depuis des lustres et n’a rien à voir avec l’intelligence artificielle et le “machine learning”. Surgisphere, Surgical Outcomes, Quartz Clinical, c’est exactement la même chose…
Dans une vidéo publiée sur le site web de Surgical Collaborative Outcomes, supprimée depuis, parole était donnée à la vice-présidente de Surgisphere et présentée comme Quartz Clinical.
Bon, admettons. Il s’agit alors d’établir un benchmark du secteur des progiciels de gestion intégrée et/ou d’aide à la décision dédiés aux médecins et aux hôpitaux.
Le progiciel de gestion intégrée pour la santé est un marché mûr où des géants comme SAP et Oracle se taillent la part du lion, que ce soit pour de l’ERP “classique”, en ligne (ASP), sur le cloud, 100% outsourcé etc. Et ces produits comprennent des modules analytiques et décisionnels avec du machine learning et de l’intelligence artificielle.
Nous n’avons jamais vu SAP ou Oracle fournir des données de soins courants extraits de dossiers médicaux dans le cadre d’études rétrospectives.
Nous n’avons jamais vu des entreprises proposer des logiciels et se faire rémunérer en partie en données médicales. Pourquoi ? Parce qu’ils ne le peuvent pas. Les données des dossiers médicaux appartiennent aux seuls patients, les hôpitaux ne les conservant qu’avec l’assentiment des patients et dans le seul but d’assurer la continuité des soins.
Par ailleurs, les témoignages de clients ayant déployé telle ou telle solution sont absolument fondamentaux d’un point de vue commercial.
C’est pourquoi les acteurs du secteur affichent des témoignages clients. Tous sauf Surgisphere, parce que donner le nom des institutions qui lui fournissent des données aurait pour résultat immédiat de leur causer un gros paquet de très sérieux problèmes judiciaires.
Bref, Surgisphere semble être un acteur qui opère à la limite de la légalité voire dans l’illégalité (mais ça c’est à une éventuelle enquête judiciaire de le déterminer) et son métier est le commerce des données sous couvert d’édition de logiciel.
En tout état de cause : est-il bien raisonnable d’utiliser les données de Surgiphere dans des études rétrospectives, puisque personne n’ayant accès aux données, l’expérience ne peut pas être reproduite indépendamment ni la validité des données évaluée ?
Vous voyez pourquoi la démission d’Olivier Véran et de tous les membres du Haut conseil de la santé publique est nécessaire, ainsi que la radiation de l’Ordre de ceux qui sont médecins ?