L'info sous les radars
" Le problème est que vous avez été éduqué juste assez pour croire ce qu'on vous a enseigné, mais pas assez pour remettre en cause tout ce qu'on vous dit" (Edgar Morin).


Match retour. Le nouveau procureur général de Grenoble, Christophe Barret, a donc décidé de faire appel de la relaxe générale, dont celle du maire de Grenoble Eric Piolle, prononcée dans l’affaire de la Fête des tuiles. Nous avions montré que l’enquête avait été menée en dépit du bon sens et que les responsabilités pouvaient difficilement être établies.
Le 25 octobre, le délibéré avait été rendu sans motivation à l’audience. Motivations qui n’ont semble-t-il toujours pas été transmises aux parties. Sollicité, le tribunal judiciaire de Valence, qui on le sait croule sous les dossiers et souffre du manque de moyens, n’avait au moment où on écrit ces lignes pas donné suite à notre demande. Quand le procureur de Valence, lui aussi contacté, s’était dit en peine de pouvoir le faire “matériellement”… Tout un symbole.
Plus longue est la chute (suite). A Saint-Pierre de Chartreuse, “l’union sacrée pour sauver la station de ski de Saint-Pierre “ selon les bons mots sortis tout droit d’un manuel de communication et gentiment repris par Le Dauphiné libéré, ressemble de plus en plus à une solution de fortune dont l’issue risque fort de conduire la station de ski droit dans le mur.
Petit rappel du dernier épisode : l’appel d’offre pour exploiter la station de ski, auquel personne de censé ne pouvait décemment répondre au vu des conditions – reprise aux risques et périls de l’exploitant et sur deux ans – ayant été déclaré infructueux, la communauté de communes se retrouve fort démunie. A un peu plus d’un mois de l’ouverture de la saison d’hiver, alors que les saisonniers manquent un peu partout à l’appel, Cœur de Chartreuse n’a plus que le bénévolat comme solution. L’ “union sacrée”, c’est donc ça.
Ce 8 novembre, les élus communautaires devraient donc valider l’idée d’un ultime recours aux bonnes volontés pour faire tourner les remontées. Quelles remontées et combien ? On hésite entre deux et trois téléskis, voire un télésiège en sus. Sans la télécabine, épine dorsale du domaine skiable, vraisemblablement. Ce qui portera à trois le nombre d’années avec un fonctionnement égal à zéro (année Covid) ou a minima.
Difficile de croire, à moins d’un total pilotage à l’aveuglette, que tout ceci n’a pas été mûrement pensé et réfléchi. Alors que les commerces et notamment les loueurs de matériel de ski ferment les uns après les autres, sur la place centrale du village, qui servait de parking aux skieurs, se dresse désormais le chantier de la construction de la maison du parc naturel régional de Saint-Pierre de Chartreuse…
Le bout du tunnel pour Castaner ? Alors que Jean Castex devrait être promptement recasé à la tête de la RATP, la Macronie continue de placer ses ouailles déchues. Dernier en date : Christophe Castaner. L’ancien ministre de l’Intérieur balayé lors des législatives, dont le nom a tour à tour circulé du côté du Grand port de Marseille puis du côté du Rocher (Le Point ), devrait prendre la présidence conjointe du tunnel du Mont-Blanc et du tunnel du Fréjus révèle Politico.
Deux pour le prix d’un. Et 150 000 euros dans la poche. De fait, les deux autoroutes et tunnels sont administrés conjointement. Histoire de coordonner les politiques de transport mais surtout d’organiser et fluidifier les échanges financiers entre les deux entités.
Car les dividendes de l’un, Autoroutes et tunnels du Mont-Blanc (ATMB), atterrissent dans les caisses – passablement dégarnies en raison notamment de l’insuffisance structurelle du trafic – de l’autre, la société française du tunnel routier du Fréjus (SFTRF) dont la dette dépasse le milliard d’euros. Environ 20 millions d’euros y sont ainsi transférés chaque année. De l’argent “détourné” pour la Ville de Grenoble administratrice à la SFTRF, qui en 2018 avait porté plainte (classée sans suite, avant appel de l’ordonnance du juge en 2021) pour détournement de fonds publics et prise illégale d’intérêt.


Du pétrole et un maroquin (en transition) mais pas d’idées. En France, on peut être ministre de la Transition énergétique, promettre de sortir le pays des énergies fossiles tout en s’en remettant au gaz de schiste américain et baigner le plus tranquillement, et surtout discrètement, du monde dans le pétrole.
Disclose révèle qu’Agnès Panier-Runacher est liée à une société créée par son père pour le compte de ses enfants mineurs. Une société, Arjunem, qui partage des intérêts financiers avec Perenco, numéro 2 du pétrole en France, et qui détient plus de 1 million d’euros dans des paradis fiscaux.
Défense de l’intéressée que la perspective d’une démission ou de quelconques regrets ne semble pas effleurer ? S’agissant de ses enfants, elle n’avait rien à déclarer à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Pas de chance, la HATVP ne voit pas tout à fait les choses de la même manière.
« L’absence d’obligation déclarative ne dispense pas le responsable public de veiller à prévenir et faire cesser les situations de conflits d’intérêts qui naîtraient d’autres intérêts indirects détenus, tels que l’activité des enfants ou d’autres membres de la famille », observe la HATVP.
Rappelons qu’Agnès Pannier-Runacher avait déjà été épinglée pour avoir recruté son compagnon comme chef de cabinet, infraction passible de 3 ans de prison et à 45 000 euros d’amende.
L’hôpital d’Annecy dans de mauvais draps. A l’hôpital d’Annecy, tout a manifestement été fait en dépit du bon sens. Une stratégie immobilière sans concertation. Un programme immobilier trop lourd pour des finances déjà raplapla après la fusion avec l’hôpital voisin de Saint-Julien et la réforme des transfrontaliers qui a fait perdre 5 millions de recettes chaque année à l’établissement. Le Ségur de la Santé et ses 60 millions d’euros n’y suffiront pas : entre un résultat déficitaire depuis 2016 et un taux d’endettement très élevé, qui a presque doublé en six ans, le centre hospitalier est dans le rouge.
« Les marges de manœuvre du centre hospitalier en matière d’investissement sont réduites pour plusieurs années, obérant ainsi les projets pour le site de Saint-Julien », pointe un rapport de la chambre régionale des comptes. Entre autres. Car les irrégularités sont légions. On y apprend ainsi que de nombreux marchés de travaux ont été passés, à Eiffage notamment, sans mise en concurrence. Ce qui a valu à l’ancien directeur Nicolas Best, qui officie aujourd’hui à l’hôpital de Nîmes, d’être placé en garde à vue. Ni une ni deux, lui a basé sa défense sur… une attaque en règle de la magistrate chargée d’éplucher les comptes de l’hôpital annécien, vilipendée pour son enquête “à charge”.


Justice aux petits oignons. Cela devient une manie que de charger les chambres régionales des comptes, coupables surtout de porter au grand jour et dans les médias des faits dont on se garderait bien de faire la publicité. Ça tombe bien, le premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, devrait pouvoir mener sa réforme à son terme en 2023. Soit consacrer l’irresponsabilité des gestionnaires publics, décideurs et élus et notamment en fermant les yeux sur les petits délits et autres broutilles pour se focaliser sur les plus gros dérapages. Avec le risque de faciliter la corruption, craignaient et alertaient au printemps des magistrats financiers dans L’Eclaireur (article ci-dessous).
Une réforme qui suit son chemin. Après une levée de boucliers de représentants de la profession, tout est à peu près rentré dans l’ordre. Manifestement, il n’y a plus guère de vagues sur le sujet. Contacté par L’Eclaireur, le président du syndicat des juridictions financières, seul syndicat dans la profession, renvoie désormais l’enjeu à une question de moyens.
Non sans avoir toutefois obtenu la garantie que la chambre de la Cour des comptes, qui récupère la compétence de jugement des gestionnaires publics, sera composée pour moitié de magistrats de chambres régionales des comptes (CRC) « qui connaissent le terrain », précise Pierre Genève. Et non seulement de magistrats de la Cour des comptes et du Conseil d’État flanqués de deux personnalités nommées par le Premier ministre comme prévu initialement.
La compétence juridictionnelle étant le socle de l’indépendance et du statut de magistrat financier, on voit qu’on a échappé au dépeçage en règle des CRC. Et à une tentative de contrôle voire de reprise en main (re-centralisation en langage diplomatique) dans le droit fil d’une police judiciaire que le gouvernement verrait bien aux ordres des préfets …

