Otan en emporte l'argent
La bureaucratie otanienne est corrompue, comme le montrent les enquêtes judiciaires diligentées par au moins six Etats membres visant la NSAP, sa centrale d'achat d'armes.
On ne vous le dit jamais : l’OTAN est bien plus qu’une simple alliance militaire. C’est une organisation supranationale opérant en Europe, une bureaucratie qui, depuis sa création, est hors de contrôle des ses membres non anglo-saxons, au point d’agir contre leurs intérêts - lorsqu’elle ne se mêle pas directement des affaires internes de ses membres.
Nous ne vous rappellerons pas les réseaux “stay-behind”, ces unités paramilitaires constituées avec tous les fascistes, nazis et collaborateurs que les Américains et les Anglais ont pu récupérer en Europe après la Seconde Guerre mondiale, pour former une “résistance” prête à l’emploi en cas d’invasion soviétique. Ce sont à ces unités paramilitaires que l’on doit la stratégie de la tension en Europe entre les années 1960 et 1980, qui a donné, par exemple, les années de plomb en Italie, où les attentats d’extrême droite firent bien plus de morts que ceux du terrorisme d’extrême gauche.
Toutes les opérations extérieures auxquelles l’OTAN a participé, en infraction à son mandat d’alliance défensive, ont tourné à l’échec. Bombardement de la Serbie en 1999 et création du Kosovo : une catastrophe dont nous payons encore les conséquences vingt-cinq ans plus tard. ISAF en Afghanistan : une défaite totale face à des insurgés en sandales et shalwar kameez. Changement de régime en Libye: un pays en guerre civile depuis 14 ans et une crise migratoire insoutenable en Europe. Et bien sûr, cerise sur le monceau de plus d’un million de cadavres et d’économies européennes en ruine, l’Ukraine.
Comme toute bureaucratie laissée sans réel contrôle démocratique – c’est également le cas de l’ensemble des institutions européennes – l’OTAN poursuit depuis fort longtemps ses propres objectifs de manière autonome. Cette bureaucratie travaille d’abord à sa propre croissance et à l’extension de son pouvoir. Supranationale par nature, elle échappe largement à la justice.
Il s’avère aujourd’hui que l’OTAN est corrompue jusqu’à la moelle.
Avez-vous entendu parler de la NATO Support and Procurement Agency (NSPA, ou Agence de l’OTAN pour les acquisitions) ? Il s’agit d’une agence exécutive – l’OTAN en compte cinq – sise au Luxembourg et employant plus de 1 200 personnes. Si vous voulez savoir pourquoi nombre d’uniformes de l’armée française ne sont plus fabriqués en France et pourquoi on a remplacé nos rations de combat, que les armées du monde entier nous enviaient, par des produits insipides fabriqués en Espagne, ne cherchez plus : ces achats sont effectués via la NSPA.
Les missions de la NSPA sont les suivantes :
Acquisition des systèmes d’armes et gestion de leur cycle de vie ;
Services logistiques et gestion de projets ;
Soutien aux opérations et exercices ;
Gestion des carburants ;
Transport et stockage stratégiques.
La NSPA est une gigantesque centrale d’achat qui référence l’ensemble des équipements, matériels, armes, munitions, consommables et fournisseurs disposant d’un agrément OTAN. Cela permet aux pays membres de l’Alliance atlantique d’acheter par son entremise en toute confiance, sans passer par de longs et coûteux processus d’évaluation, pris en charge par la NSPA. C’est l’assurance d’acheter selon les normes STANAG (Standardization Agreement), accords de standardisation des procédures, équipements, terminologies ou pratiques entre les pays membres de l’Alliance, visant à garantir l’interopérabilité.
Très pratique pour les petits pays ne disposant pas de structures comme l’Under Secretary of Defense for Acquisition and Sustainment américain ou la Direction générale de l’armement française, la NSPA gère un gigantesque marché captif de 7 milliards d’euros pour les achats destinés aux opérations de l’alliance, en sus de ceux des défenses nationales des pays membres qui se fournissent par son entremise. Qui dit marché captif et contrats publics dit importants risques de corruption.
Imaginez un instant que nous soyons le fonctionnaire responsable de référencer les fournisseurs de munitions de fusil d’assaut de calibre 5,56 OTAN (qui, une fois référencés, pourront apposer le sigle STANAG sur leurs munitions). Nous serions alors en position non seulement de toucher de juteux pots-de-vin pour le référencement, mais également d’en percevoir d’autres pour fausser les appels d’offres des pays membres en faveur d’un ou plusieurs fournisseurs.
C’est exactement ce qui s’est passé avec des achats de carburants marins et de munitions. La Lettre, qui a révélé ce scandale ce 19 mai, continue d’enquêter sur cette affaire. Ces marchés portaient sur plusieurs centaines de millions d’euros. Les justices belge, néerlandaise, luxembourgeoise, espagnole et italienne ont procédé à de multiples arrestations, et la directrice de la NSPA, l’américaine Stacy Cummings, est visée par une enquête interne. Elle aurait essayé de dissimuler les malversations et de faire porter de la chapeau à des cadres -comme par hasard - de nationalité française. La justice américaine s’est à son tour penchée sur ce dossier, poursuit La Lettre.
Il s’agit d’achats militaires. Si les référencements et les marchés sont truqués, se pose alors la question de la qualité des produits vendus. À la guerre, se retrouver avec un énorme stock de munitions non conformes ou défectueuses peut être mortel. Cela pose un grave problème de confiance, d’autant plus aigu que la NSPA commercialise également des missiles antiaériens, des missiles et canons antichars, des obus de 155 mm, bref, tout ce dont on a besoin pour massacrer efficacement son prochain.
Pour les industriels, le risque que représente la corruption d’un intermédiaire aussi critique pourrait s’avérer rédhibitoire, puisque remporter un gros contrat soulèvera immanquablement la suspicion de l’ensemble des autres acteurs – acheteurs comme concurrents – de cette gigantesque bourse aux armes qu’est la NSPA.
Nous n’avons pas fini d’entendre parler de cette affaire, même si la bureaucratie otanienne, dirigée par l’ineffable belliciste batave Mark Rutte, fait tout pour étouffer le scandale et déploie des trésors d’ingéniosité pour dissuader les justices des États membres de l’OTAN de se pencher davantage sur le fonctionnement de la NSPA. Ce n’est pas sans rappeler les SMS échangés par Ursula von der Leyen et le patron de Pfizer pour l’achat de 1,8 milliard de doses de vaccin anti-Covid.
Alors que M. Rutte exhorte les pays de l’OTAN à consacrer 5 % de leur PIB à la défense, et étant donné que la plupart des membres de l’OTAN, souvent de petites puissances militaires, utilisent les services de la NSPA pour des raisons de praticité et de coût, une partie de la chaîne d’approvisionnement des armées de l’OTAN pourrait bien s’effondrer. Or, comme l’a fameusement dit le général américain Walter Bedell Smith, chef d’état-major d’Eisenhower durant la Seconde Guerre mondiale : “Les amateurs discutent de stratégie ; les professionnels parlent de logistique.”
Enfin, notons que l’autre gigantesque bourse aux armes, mise en place via la Facilité européenne pour la paix (le nom prête à sourire) par l’Union européenne, sur le modèle de la NSPA (mais en pire, car basée sur un système de compensation plutôt que d’achat), pour livrer armes et munitions à l’Ukraine – un pays notoirement gangrené par la corruption – est vraisemblablement entachée d’au moins autant de malversations que l’agence otanienne. Nous avions déjà soulevé ces préoccupations dès le début du conflit russo-ukrainien en ces termes :
Les États membres de l’UE ont créé une bourse aux armes, une bourse au surplus militaire. Une sorte de pétrole contre nourriture, usine à gaz onusienne imposée à l’Irak après la seconde guerre du Golfe, mais appliqué aux armes et au sang des Ukrainiens et des Russes.
Avec des possibilités de fraude et de magouille innombrables, comme par exemple vendre des armes de surplus à une entreprise commerciale puis les lui racheter plus cher pour livraison à l’Ukraine, en se faisant rembourser par la FEP. Tout ce qui affère à la défense n’étant pas soumis aux règles de la commande publique et souvent couvert par le secret, la marge ainsi dégagée, c’est 100% de velours…
La guerre est un racket, est le titre de l’ouvrage du major-général des U.S. Marines Smedley D. Butler, un réquisitoire implacable contre les profiteurs de guerre que tout le monde se doit de lire. Vous n’avez pas d’excuse, le voici.
C'est intéressant de rappeler à quel point les marchands d'armes ont été depuis des décennies des gens qui ont exercé leur activité en toute impunité. Mais aussi comment, chez nous, nos partis politiques se sont gavés de ces "royalties" - plutôt nommés backchich maintenant - issus du commerce des armes. Pendant que de pauvres bougres, croyant au narratif d'état, mourraient de ces armes. Dans ma mémoire, le premier fut Zaharoff immortalisé par Hergé. Mais c'était un artiste à l'époque par rapport aux actuels. Et puis ce fut, chez nous, la grande époque du socialisme avec Dumas et ses chaussures en croco à qui la justice (déjà) avait reconnu son innocence à propos des vedettes de Taïwan. Dans la foulée, Balladur avec les sous-marins pakistanais. Etc..
Le plus triste c'est que maintenant, nous avons un président belliqueux qui nous a promis des armes, qui n'a respecté aucun projet inscrit dans les LPPM et qui nous a mis à poil en donnant le peu d'armes qu'on avait encore! La misère n'est pas finie puisque, comme d'hab, les armées seront la variable d'ajustement du budget dans les décennies à venir! Et je ne suis pas près de voir le remplaçant du PAN CDG !