[ Piolle c/ Clérotte] Nouveau renvoi dans le référé intenté par Eric Piolle contre L'Eclaireur
Me Thomas Fourrey, l'avocat d'Eric Piolle qui le défend également dans l'affaire de la Fête des tuiles, innove. Il vient d'inventer la procédure d'urgence lente.
L’audience en référé conservatoire par laquelle Eric Piolle entend faire supprimer des passages de l’article et du podcast ci-dessous parce qu’il les estime diffamatoires, a une nouvelle fois été renvoyée à la demande de son avocat, Me Thomas Fourrey. Me Thomas Fourrey qui, bien qu’avocat plaidant, n’a pas daigné paraître aux quatre audiences.
Hasard du calendrier ? L’audience est renvoyée au 26 octobre, le lendemain du délibéré dans lequel le tribunal correctionnel de Valence prononcera le verdict concernant Eric Piolle et ses six co-prévenus dans la même affaire de la Fête des tuiles. Procès qui s’est tenu ces 26 et 27 septembre et sur lequel nous allons revenir incessamment sous peu.
Motif invoqué par Me Fourrey et exprimé par Me Aurélie Marcel (avocate postulante qui n’en peut pas mais) pour justifier ce quatrième renvoi ? Un problème de voiture et le fait que Me Fourrey avait une instance le 27 septembre à Valence, où il défendait Eric Piolle de l’incrimination de délit d’octroi d’avantage injustifié. Comme nous l’affirmons plus haut, Me Fourrey n’a été présent à aucune audience depuis le début de la procédure qu’il a initiée. Lors de celle du 28 juillet, il était représenté par Me Julia Coppart, qui a commencé à plaider avant d’être interrompue par la présidente, qui ordonna le renvoi. Au motif que Pascal Clérotte devait être assisté d’un avocat. Ce que l’assignation de Me Fourrey ne précisait pas, comme elle aurait dû le faire.
Bref, sans nullement comparer le tribunal judiciaire de Grenoble à un cirque et Me Fourrey à un clown, il existe un parallèle aussi frappant qu’amusant entre la procédure dont lui et son client Eric Piolle sont les initiateurs et ce fameux sketch du “Monty Pyhton’s Flying Circus” intitulé (en français) “L’inquisition espagnole”.
Ce taquin liminaire fait, rentrons dans le vif du sujet.
Le référé est une procédure d’urgence par laquelle ils est demandé au juge de l’urgence, généralement le président de la juridiction compétente, de prendre des mesures provisoires pour faire cesser un trouble manifeste le temps que le juge du fond se prononce sur ce trouble.
Après six mois d’urgence, la procédure en référé intentée par Eric Piolle et son conseil n’est-elle pas en état de mort de cérébrale ? Ne devrait-on pas la débrancher ? Il appartient au juge des référés de trancher, lors de la prochaine et cinquième audience. Et, espérons, la dernière.
Au surplus, l’assignation de Me Fourrey est nulle. C’est ce que soulève Pascal Clérotte. Nullité de l’acte qu’est l’assignation parce qu’en la rédigeant, Me Fourrey a méconnu le formalisme strict imposé par le législateur.
En clair, Me Fourrey a de prime abord planté sa propre procédure dès son origine. Et puisque l’assignation est le seul moyen de saisine du juge des référés, cette saisine est donc également nulle. L’acte doit être anéanti, la procédure aussi.
“Ennemie jurée de l'arbitraire, la forme est la sœur jumelle de la liberté” a fameusement écrit Rudolf von Jhering …
Cette assignation en référé fait-elle partie d’une stratégie judiciaire plus large dans le cadre de la comparution d’Eric Piolle devant la justice pénale ? Ou bien est-ce la manifestation d’un maire qui s’est convaincu d’être sous “le feu des mitraillettes de Pascal Clérotte”, comme il l’a déclaré à la barre du tribunal correctionnel de Valence le mardi 27 septembre 2022 ?
Pascal Clérotte n’est connu ni de la justice et ni services de police et de renseignement pour détention, port prohibé, et usage d’armes de catégorie A sur la personne d’un maire écologiste dans l’exercice de ses fonctions sur une piste cyclable lors d’un drive-by shooting à Grenoble, qui n’est effectivement pas (encore) Chicago.
Cela n’a somme toute aucune importance. Cela n’est que subsidiaire scorie, voire irritante argutie.
Voici les arguments juridiques de Pascal Clérotte, pour ceux que cela intéresse.
1 - Principalement, in limine litis :
1.1 De la nullité de l’assignation
Lors dernière audience du 28 juillet 2022, le juge des référé a signifié à la défense qu’afin de faire valoir ses droits, la modalité de comparution qu’impose la loi est qu’elle soit impérativement représentée par un avocat, puisque la demande de la partie civile est indéterminée.
Nulle part dans l’assignation produite par le conseil de la partie civile et qui a été remise à la défense le 24 mars 2022 par un clerc de Me N’Kaoua, Commissaire de justice, n’est mentionné l’obligation de représentation par avocat.
L’article 114 du Code de Procédure Civile stipule :
« Aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public. »
L’article 56 du Code de Procédure Civile stipule expressément:
« L'assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice et celles énoncées à l'article 54:
1° Les lieu, jour et heure de l'audience à laquelle l'affaire sera appelée ;
2° Un exposé des moyens en fait et en droit ;
3° La liste des pièces sur lesquelles la demande est fondée dans un bordereau qui lui est annexé ;
4° L'indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire. »
L'assignation précise également, le cas échéant, la chambre désignée.
Elle vaut conclusions.
L’article 752 du Code de Procédure civile stipule expressément:
« Lorsque la représentation par avocat est obligatoire, outre les mentions prescrites aux articles 54 et 56, l'assignation contient à peine de nullité :
1° La constitution de l'avocat du demandeur ;
2° Le délai dans lequel le défendeur est tenu de constituer avocat. »
L’assignation de la partie civile viole manifestement les article 56 et 752 du Code de Procédure Civile, ce qui la frappe de nullité, et par voie de conséquence la saisine du Juge de référés l’est également, l’assignation étant l’acte introductif d’instance, seule voie de sa saisine et valant conclusions.
La grave faute de procédure commise par la partie civile a significativement désorganisé les moyens de défense de Pascal Clérotte, ce depuis le 24 mars 2022. Le référé conservatoire est une procédure d’urgence, en l’espèce concernant la liberté de la presse et au cours de laquelle les droits de la défense ont dès l’origine de la procédure été méprisés et obérés par la partie civile.
Le grief est caractérisé puisque que ces irrégularités ont perturbé le cours du procès depuis 6 mois et que l’obligation de représentation par avocat introduit une différence fondamentale par rapport à une défense in personam. Si le conseil de la partie civile ne s’était pas gravement mépris de procédure, le procès aurait déjà eu lieu, et aurait évité au défendeur de consacrer un temps et une somme de travail considérable à préparer sa propre défense.
Le juge des référés n’a d’autre choix que de prononcer l’anéantissement de l’assignation et ne peut donc pas exiger de la défense la représentation par avocat.
1.2 Exception d’inobservation d’une formalité substantielle : de l’assignation du mauvais responsable
L’article 93-2 de la loi du 29 juillet 1982, sur la communication audiovisuelle modifiée par la Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique précise que « Tout service de communication au public par voie électronique est tenu d'avoir un directeur de la publication. »
Les articles 42 et 43 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse mettent en place un mécanisme de responsabilité en cascade en matière de droit de la presse où le responsable de premier rang est le directeur de publication.
Comme stipulé dans l’assignation en référé délivrée par la partie civile et comme constaté par Commissaire de justice, la directrice de la publication de l’Eclaireur Rhône-Alpes est Mme Patricia Cerinsek, journaliste. C’est par conséquent à Mme Cerinsek qu’il faut assigner et à qui il faut enjoindre de supprimer les passages incriminés par la partie civile, non pas à la défense, M. Pascal Clérotte.
Comment la défense pourrait-elle être condamnée à supprimer ce qu’elle n’a pas autorité à supprimer et être en sus condamnée à une astreinte pour la non-suppression de ce qu’elle n’a pas autorité à supprimer ? Le grief est ici aussi évident que caractérisé.