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L'Europe de la santé, du vent en rase campagne (featuring Olivier Véran)
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La Lettre confidentielle

L'Europe de la santé, du vent en rase campagne (featuring Olivier Véran)

A Grenoble, le ministre de la santé a vanté une politique européenne de santé qui n'existe pas. Car la santé n'est pas une compétence européenne. Mais l'objectif n'était peut-être pas là.

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Patricia Cerinsek
févr. 12, 2022
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Qu’est ce que l’Union européenne de la santé ? Ou dit autrement, l’Europe de la santé ? Un slogan de campagne ? Une déclaration de bonne intention ? Du… vent ?

Le 10 février à Grenoble, les vingt-sept ministres de la Santé européens ont sabré le champagne. Pour, dixit le discours officiel, poser les premiers jalons d’une Union européenne de la santé… qui n’existe pas. Et ne peut surtout pas exister en l’état des traités. A coup de formule parfois ronflante, et notamment l’annonce d’une Déclaration de Grenoble 1 à venir (qui fait les gros titres de nombreux médias, le plan com’ a bien fonctionné…) qui serait ainsi le texte fondateur d’une politique de la santé qui dans la pratique – on ne parle plus des traités – est tout sauf commune. Et même pas partagée comme on a pu remarquablement le voir avec la gestion de la crise de la Covid-19 et dont l’épisode de la bataille de chiffonniers autour des masques a permis de mesurer l’ampleur du chemin à parcourir.

Car la santé n’est pas stricto sensu une compétence européenne. Cela signifie que non seulement la santé reste du ressort des Etats membres mais aussi que les décisions de l’Union ne sont pas contraignantes au niveau juridique 2. Les quelques compétences dans le domaine de la santé touchent en fait notamment à la libre circulation des personnes et des marchandises dans le marché intérieur.

Partant de là, évoquer une « Europe de la santé » relève dans le meilleur des cas d’un abus de langage. Au mieux s’agit-il de mieux coordonner l’action des Etats membres entre eux, étant entendus qu’ils se soient au préalable mis d’accord. D’améliorer et de mieux prévenir. Mais aussi de mieux informer et éduquer.

Extrait du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Beaucoup de bruit pour pas grand chose ? Jeudi, à Grenoble, il s’agissait d’une réunion informelle – forcement puisque hors compétence européenne – dont l’écho est du reste resté limité à l’Hexagone.

Une réunion où le ministre de la santé français faisait office de maitre de cérémonie tout en arpentant le territoire de son ancienne (et future ?) circonscription. Petit rappel : avant d’être ministre, Olivier Véran était député de l’Isère. On l’a ainsi vu du côté de Corenc à la pause-déjeuner. Un bâton de pèlerin aussitôt repris le lendemain. On a en effet (re)vu le ministre visiter un centre dentaire vendredi 11 février à à Meylan (dans sa circo), faire un petit coucou à un audioprothésiste à Saint-Ismier (dans sa circo) et à un opticien — avec micro tendu – cours Berriat à Grenoble (dans sa circo, sûrement pure coïncidence).

Avant d’être ministre LREM, Olivier Véran était aussi socialiste. Au four et au moulin, et à la pêche aux ralliements à Emmanuel Macron, le ministre de la Santé aurait également d’après La Tribune endossé le costume de rabatteur auprès des élus de gauche à la demande de l’Elysée.

Stella Kyriakides, commissaire européenne à la santé chypriote © Patricia Cerinsek

Mais revenons à la réunion des vingt-sept. Une réunion informelle donc, chapeautée par Stella Kyriakides, la commissaire européenne à la santé chypriote dont les démêlés avec la cour des comptes de son pays – qui considère les transactions accordées dans des conditions opaques à son mari comme très problématiques – commencent à faire quelques remous politiques.

Voilà pour la forme. Ou pour le décor. Le fond ? L’idée est comme à chaque crise sanitaire, de tirer les leçons, surfer sur l’agitation/l’émoi/la prise de conscience plus ou moins affirmée – et qui est, là pour le coup en train de s’étioler avec une pandémie qui ressemble de moins en moins à une… pandémie malgré les dénégations du ministre 3 – pour tenter de faire bouger les lignes. Ou faire croire qu’on va/peut les bouger.

Autant donc y aller fort. « Je pense que l'Union européenne peut devenir la championne mondiale de la santé publique », s’est enthousiasmé le ministre en conclusion de cette journée. Olivier Véran en veut pour preuve l’action « convaincante » de l’Union européenne sur les vaccins et les traitements.

Rappelons que si côté vaccin AstraZeneca, la Commission européenne s’est saisie à la volée d’un accord d’abord passé à quatre, le feuilleton du contrat avec Pfizer continue d’empoisonner le quotidien d’Ursula Von der Leyen. Quand la plus grande pagaille a régné du côté des traitements. En Europe, tous les pays ont ainsi passé commande du Remdesivir, à l’exception de la France et du Luxembourg. Pour ce qui est du Molnupiravir, les commandes ont été passées puis annulées. Pas franchement glorieux.

L’idée est donc de faire bouger les lignes pour plus de coordination et de coopération. Difficile de faire plus. La marge de manœuvre a beau être étroite, cela n’a en rien freiné l’élan du ministre français qui voit poindre la seconde étape de la construction de l’Union de la santé.

La première étape ? L’agence européenne du médicament a été réformée. Un « mécanisme de préparation et de riposte aux crises sanitaires » a été mis en place. Pour donner naissance à Hera, la Health Emergency Response Authority, inspirée de la Barda, la Biomedical advanced research and development, autorité américaine pour la recherche et développement. Inspirée seulement car les moyens (dix fois moins) ne sont pas les mêmes.

Objectif de Hera ? Constituer des stocks stratégiques de traitements et de matériel médical pour limiter la dépendance de l’Europe à des pays tiers notamment en matière de principes actifs.

Une nouvelle agence, qui vient s’ajouter à la liste des cinq déjà en lice en matière sanitaire 4. Faudra-t-il coordonner les agences entre elles ? En attendant, Hera ne fait pas vraiment l’unanimité. Car si elle est pilotée par un conseil d’experts de la Commission européenne et des représentants des Etats, le parlement européen n’a pas été associé. Avec le risque pour certains que l’agence ne soit qui plus est qu’une coquille vide.

« Ursula Von der Leyen souhaitait dans son discours sur l’état de l’Union en 2020 créer une véritable agence pour la recherche et le développement », expliquait Nathalie Colin-Oesterlé, députée européenne (PPE) en septembre 2021 sur France Inter.

« Aujourd’hui on ne parle plus que d’une autorité européenne de préparation et d’intervention en cas d’urgence sanitaire. En fait, cette autorité n’est plus qu’un simple service au sein de la direction générale de santé de la commission. Il ne faut pas que cette autorité européenne soit une coquille vide ni un simple comité de réaction à la main de la commission et des Etats membres ».

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