Le journaliste américain qui a révélé les "Twitter Files" enguirlande Thierry Breton
Alors que la liberté d'expression est strictement protégée aux Etats-Unis, la mise en garde du commissaire européen adressée à Facebook et X ne pas passe outre-atlantique.
Matt Taibbi est un journaliste chevronné. C’est lui qui a analysé le gros paquet de données que lui a remis Elon Musk et a ainsi mis en évidence le programme de censure à grande échelle conçu par le gouvernement fédéral américain avec la complicité des réseaux sociaux, au prétexte de “l’intégrité des élections” et de la Covid. Alors qu’il s’agissait de manipuler les élections et d’imposer des mesures sanitaires qu’on savait déjà à l’époque aussi inefficaces qu’imbéciles – sauf pour les labos, bien sûr.
Nous nous sommes déjà fait l’écho du travail de Matt Taibbi, notamment dans cet édito.
[ EDITO ] "Twitter files", fin de régime
Elon Musk a remis au journaliste Matt Taibbi tous les fichiers internes à Twitter concernant les opérations de “modération” de la plateforme. Matt Taibbi a publié le 2 décembre une première fournée de documents afférents à la censure de l’enquête du
Ayant obtenu copie des lettres qu’a envoyé l’ineffable Thierry Breton pour se plaindre du manque de censure à Mark Zuckerberg, le patron de Facebook-Meta et à Elon Musk, celui de Twitter devenu X, Matt Taibbi dit tout le bien qu’il pense de “ces eurocrates à lunettes de designer”. Rappelons qu’aux Etats-Unis, le premier amendement de la Constitution protège absolument la liberté d’expression, qui est totale – que Thierry Breton le veuille ou non.
Cela n’a pas empêché la Commission européenne, qui ne dispose d’aucun pouvoir de police tant administrative que judiciaire, d’“ouvrir une enquête contre X, apprend t-on dans La Tribune. Alors qu’à notre connaissance aucun Etat membre de l’UE n’a encore transposé dans son droit national l’inique DSA.
Elon Musk peut être tranquille, il a le temps. Cela se finira en justice et on verra si des “vérifications” effectuées par des ONG stipendiées seront considérées comme des preuves ou commencements de preuve. ONG n’est pas OPJ1 .
N’oublions pas que le DSA est la copie carbone de la loi Avia “contre les contenus haineux sur Internet”, loi censurée dans sa quasi intégralité par le Conseil constitutionnel en 2020. A l’époque, Emmanuel Macron et sa bande avaient fanfaronné en affirmant qu’ils la feraient passer au niveau européen lors de la présidence tournante de la France de l’UE en 2022. Ils arguaient de la supériorité du droit européen sur les droits nationaux. Cela a visiblement été fait. Sauf que ce qui est inconstitutionnel en France le reste, droit européen ou pas.
L’origine de la loi Avia remonte au tout début du quinquennat de François Hollande, où l’on a pu voir dès 2023 Najat Vallaud Belkacem exiger plus de censure sur les réseaux sociaux, ce qui lui avait à l’époque valu les foudres du journaliste Glenn Greenwald (récompensé par le prix Pulitzer pour sa révélation de l’affaire Snowden) dans les colonnes du quotidien anglais The Guardian.
Cette loi a d’abord été pensée par l’Aspen Institute, un think-tank américain aussi progressiste qu’élitiste dont la branche française a été présidée par un certain Jean-Pierre Jouyet, ancien patron de l’inspection des finances (où il fit rentrer Emmanuel Macron), ancien ministre des affaires européennes de Nicolas Sarkozy, ancien secrétaire général de François Hollande durant tout son mandat. Le monde est petit, non?
L’Institut Aspen, vous vous en parlions déjà à propos de la commission Bronner.
[Édito] Debunkocratie
Avertissement au lecteur: ça va être un peu long. Le sujet l’exige. Un bon mot de notre cru et dont nous sommes très fiers (nous le répétons donc à l’envi) : le “fact checking” consiste à vérifier la conformité des faits au discours officiel. La lecture des “Décodeurs” du Monde, du “Checknews” de Libé ou bien d’AFP “Factuel” en est la navrante confirmation quotidienne.
On risque de rigoler un grand coup quand la notion de “propos haineux illégaux” qui n’a aucune matérialité juridique finira devant les juges européens qui seront vraisemblablement dans l’obligation de se déclarer incompétents puisque l’UE n’est pas un Etat souverain et ne dispose pas de Constitution. Et la liberté d’expression étant un droit constitutionnel, allez hop ! Systèmes judiciaires nationaux…
Pour finir, l’entrave à la liberté d’expression est en France un délit, puni d’un à trois ans de prison selon les circonstances. La Commission européenne peut-elle raisonnablement au nom de la loi dont elle n’est pas dépositaire exiger qu’une entreprise l’enfreigne ?
La Commission européenne est devenue une simple succursale de l’Etat fédéral américain – nous vous en avons parlé dans cet article – qui l’utilise pour faire ce qui est constitutionnellement impossible de faire aux USA. On a toutes les chances de voir l’Etat fédéral américain signaler aux ONG les contenus qu’il veut voir supprimer, dont la Commission européenne s’empressera d’exiger la suppression. Car depuis une ordonnance d’une cour d’appel fédérale, la Maison Blanche, le FBI, le CDC et quatre autres agences fédérales n’ont plus le droit d’exiger des plateformes la suppression de contenu. Vous la voyez, l’astuce ?
L’article de Matt Taibbi est à lire ici en anglais.
Morceaux choisis - et verts - ci dessous.
Europe, ne te mêle pas de notre liberté d’expression
Par Matt Taibbi, Racket News
Le commissaire européen au marché intérieur Thierry Breton s’est fendu de deux courriers, un à Mark Zuckerberg de Meta et l’autre à Elon Musk de X, exigeant qu'ils se conforment à la nouvelle réglementation de l'UE sur Internet, la loi sur les services numériques (le DSA, Digital Services Act en bon “européen”, ndlr).
Ces deux missives contiennent des passages où Thierry Breton se plaint de l’incapacité des plateformes à supprimer les “contenus illégaux”, un concept qui arrivera sûrement bientôt aux États-Unis, si nous ne nous battons pas avec acharnement contre.
Extrait de la lettre à Zuckerberg :
“Je vous demande d'être très vigilant pour garantir le strict respect des règles du DSA sur les conditions de service, sur l'exigence d'une action rapide, diligente et objective suite aux notifications de contenu illégal dans l'UE, et sur la nécessité de mesures de modération proportionnées et efficaces.”
Extrait de la lettre à Musk :
“Lorsque vous recevez des notifications de contenu illégal dans l'UE, vous devez être réactif, diligent et efficace pour prendre les mesures appropriées et supprimer le contenu incriminé. Nous disposons de signalements, provenant de sources qualifiées, de contenus potentiellement illégaux circulant sur votre plateforme.”
Je pense qu’il ne va pas suffire que Zuckerberg et Musk envoient promener Thierry Breton. Ils devraient embaucher Louis C.K. et le dépêcher à Bruxelles pour lui dire en personne, à l'américaine, de manger un sac de b… (…)
(…) Les “sources qualifiées” mentionnées par Thierry Breton font référence à la partie la plus odieuse et dystopique du DSA, le programme dit “trusted Pagger” (dénonciateurs de confiance, ndlr), qui met un quarteron d'ONG élitistes en charge d'examiner le contenu afin de dénoncer ce qui est “faux” ou “nuisible”, afin de “défendre les normes européennes”.
(…) Les dirigeants de la Silicon Valley devraient respectueusement inviter l’UE à lancer sa propre plateforme totalement policée, le Deutschebook, envoyer un emoji doigt d’honneur de l’autre côté de l’Atlantique, puis passer le reste de la journée à détruire à la mitrailleuse lourde des étagères IKEA dans les parkings de leurs bureaux. (…)
(…) L’une des principales lignes sous-jacente de la nouvelle ère du “complexe industriel de la censure” est le rôle de premier plan que l'Europe assume dans la mise en œuvre de lois draconiennes sur la liberté d'expression, ses dirigeants estimant avec une certitude impérieuse que leurs conceptions liberticides seront imposées aux États-Unis, que cela nous plaise ou non. Regardez la vidéo de la vice-présidente de la Commission européenne, Věra Jourová, qui, lors du Forum économique mondial, a déclaré en face du modérateur batracien et complaisant Brian Stelter (présentateur licencié de CNN pour manque d’audience, ndlr) que les restrictions des “discours de haine illégaux, vous les aurez bientôt aussi aux États-Unis”. Je vous recommande d’avaler un ou deux calmants avant de visionner ce qui suit. Sinon vous n’aurez alors qu’une seule envie : vous ruer dehors pour mettre des Saab dans le fossé. (…)
(…) Thierry Breton veut que les Américains contrôlent leur liberté d’expression comme lui le dit ? Qu’il mette son tricorne, traverse l’Atlantique et nous force à le faire ! (…).
Officier de police judiciaire