[Republication] MAGA, Make America Golf Again
En frappant l'Iran, Trump vient de trahir les Américains, qui ne l'ont pas élu pour cela. Il vient de mettre lui-même un terme à sa présidence.
Nous republions notre article du 22 juin dernier en accès libre, publié après les frappes de l’Iran décidées par Donald Trump, dans lequel nous avancions déjà que Donald Trump venait de mettre de lui-même fin à sa présidence après le plus formidable come-back de l’histoire politique des USA.
Alors que l’administration Trump fait face à une puissante révolte de sa base et de l’opinion publique américaine, le président américain a du effectuer un volte-face sur le dossier Epstein, qu’il avait promis de publier tout le long de sa campagne électorale, pour affirmer une fois élu qu’il n’y était vide.
Alors qu’il le qualifiait encore une heure auparavant de “canular organisé par les démocrates” , il a finalement appelé les parlementaires républicains à voter la motion introduite par Thomas Massy (R) et Ro Khanna (D) visant à décharger la commission parlementaire en charge de ce dossier et soumettre au vote la publication de l’ensemble du dossier Epstein. Cela a été fait hier à la chambre des représentant à l’unanimité moins une voix.
Il faut dire que le gouvernement fédéral ayant été fermé pendant 6 semaines et que le président de la Chambre des représentants n’a pas jugé de la convoquer durant cette fermeture - afin d’éviter le vote de la motion de décharge - les députés sont retournés dans leur circonscriptions, où ils ont été sèchement attrapés par leurs électeurs. De retour à Washington, le parti républicain a fait les comptes: plus d’une centaine de députés avaient tourné casaque, élections intermédiaires de l’année prochaine obligent. La Maison Blanche a donc du avaler son chapeau.
La fronde ne se limite pas qu’à l’affaire Epstein, qui va vraisemblablement faire sauter le système des grands donateurs aux campagnes électorales, système dont les cœur est l’American-Israel Public Affairs Committe (AIPAC), le lobby israélien aux USA. Les Américains ne veulent plus entendre parler de guerres d’agressions menées pour le compte d’autres pays et en ont soupé qu’un micro-Etat moyen-oriental décide de la politique étrangère américaine.
Ainsi donc l’orange-outrance qui réside à la Maison Blanche a décidé de lancer des frappes sur l’Iran, qui pourraient bien déboucher sur la Troisième Guerre mondiale. Enfin, si ces frappes sont bien celles que le Pentagone prétend qu’elle ont été - ce qui est loin d’être évident, nous le verrons plus bas. Nous avons promptement rebaptisé “Operation Midnight Hammer” en “Operation Midgnight Putter”. Voici pourquoi.
Le point de rupture militaire menant à l’escalade n’est pas forcément atteint. En revanche celui de Donald Trump avec sa base électorale l’est. Même chose pour la confiance du reste du monde dans la parole du président américain : qui sera assez fou pour négocier en toute bonne foi avec une administration qui ne connait que le transactionnel et n’a aucun respect pour le seul principe qui vaille en droit international, le respect de sa signature?
En frappant les installations nucléaires iraniennes, Donald Trump vient de trahir la principale raison pour laquelle les Américains l’ont élu: plus de chasse au monstre à l’étranger, selon la maxime de John Quincy Adams, le sixième président des USA1.
Son narcissisme l’a emporté à la fois sur la raison et sur les intérêts des États-Unis, ainsi que sur la considération de l’empreinte qu’il laissera dans l’histoire. Outre les conséquences géostratégiques et militaires sévères sur lesquelles nous reviendrons, Donald Trump vient de faire exploser, dès le départ, la coalition qui l’a fait élire et qui lui assure la majorité dans les deux chambres du Congrès.
Sa présidence est terminée. Il vient de faire lui-même le travail que l’Etat profond tente d’accomplir sans succès depuis six mois. Il devra se contenter d’éructer dans le Bureau ovale et sur Truth Social. Il est désormais un canard boiteux aux ailes rognées. MAGA risque fort de signifier, pour le reste de son dernier mandat, Make America Golf Again.
L’opinion publique se forme aujourd’hui sur les réseaux sociaux : seuls ceux qui possèdent les médias mainstream ou qui en dépendent pour exister croient encore que ces derniers remplissent cette fonction.
Le café du commerce à toujours été le forum, pas les plateaux télé. Les podcasters – Tucker Carlson, Dave Smith, Joe Rogan, Candace Owens, Mike Benz, Megyn Kelly, Theo Von, etc. – sont ceux par lesquels les Américains qui souhaitent s’informer s’informent. Pour ceux qui aiment lire, il y a les médias et les journalistes indépendants : Matt Taibbi, Glenn Greenwald, Lee Fang, et al. Et là, le verdict est sans appel : trahison du mandat confié par les électeurs à Donald Trump.
Toute velléité de réforme en profondeur de l’État américain est désormais nulle et non avenue, anéantie. Il n’y a rien de pire que de susciter d’immenses espoirs pour, une fois au pouvoir, s’empresser de les reléguer au placard. La promesse non tenue de la liberté pèse bien plus que les chaînes de la servitude.
L’amère pilule qui reste coincée dans la gorge de nombreux Américains est le constat que la politique étrangère des États-Unis n’est pas souveraine, mais dictée par des intérêts étrangers. L’administration semble privilégier le bien-être des Israéliens à celui de ses propres citoyens, et, par des guerres sans fin menées pour le compte de l’État hébreu, elle organise la spoliation de la multitude au profit d’une infime minorité. La rupture du contrat social qui cimentait la société américaine, rupture intervenue depuis une trentaine d’années, est perçue comme irrémédiablement gravée dans le marbre, alors que Trump a été élu sur la promesse de le restaurer.
Il faut prendre très au sérieux les appels à la création d’un troisième parti politique de masse, qui n’est plus une arlésienne comme au temps de Ross Perot2 et de Ralph Nader3. Il existe un puissant mouvement de fond dans la société américaine en ce sens. Il s’appuie sur des personnalités politiques et médiatiques, des infrastructures – la multitude d’organisations de la société civile qui ont appelé à voter pour Trump – et des financements susceptibles de porter efficacement cette troisième voie sur les fonts baptismaux.
L’alternance politique que représentent les deux élections de Trump n’apportant aucun changement tangible, quel est l’intérêt de voter si une alternative réelle à l’hyper-normalisation n’est pas proposée ?
Le fonctionnement du système politique américain fait que le pays est en campagne électorale permanente. Les élections de mi-mandat ont lieu deux ans après l’élection présidentielle, et nous sommes aujourd’hui dans une situation inédite : une partie significative des représentants – des députés – républicains n’est pas issue de l’establishment du parti ; ce ne sont pas des politiciens professionnels agissant pour le compte de leurs donateurs. Illustration : les très grandes difficultés que rencontre l’administration Trump pour faire voter son premier budget – la « Big Beautiful Bill » qui la mènera jusqu’aux élections intermédiaires de novembre prochain – alors qu’elle dispose pourtant d’une majorité absolue dans les deux chambres du Congrès.
Les conséquences électorales de la décision de Donald Trump de frapper l’Iran pourraient s’avérer incalculables. Nombre de bellicistes professionnels qui peuplent Washington – Ted Cruz, Tom Cotton, Lindsey Graham et les autres – risquent fort d’être battus, tant la volonté « dégagiste » au sein de l’électorat est importante. Qui va s’en plaindre, surtout s’ils sont remplacés par des candidats n’étant pas issus de l’establishment?
Le risque de destitution qu’encourt Donald Trump est bien réel s’il outre-passe ses pouvoirs en déclenchant une guerre, que seule le Congrès peut déclarer. Une motion bipartisane portée par le républicain Thomas Massie et le démocrate Ro Khanna visant à interdire au président de décider seul de l’usage de la force militaire sera examinée prochainement.
Selon le Pentagone, six bombardiers B-2 Spirit ont largué au moins six bombes GBU-57 sur le site nucléaire de Fordow, et trente missiles de croisière Tomahawk ont été tirés sur ceux de Natanz et Ispahan à partir de sous-marins.
Trente-six munitions utilisées ? Curieuse coïncidence, car les sous-marins d’attaque américains emportent chacun 12 missiles de croisière. Il aurait donc fallu trois sous-marins sur zone pour procéder aux frappes, ce qui est tout à fait réalisable à faible risque, souligne Armchair Warlord, un ancien haut fonctionnaire du Pentagone.
En octobre 2024, l’US Air Force avait refusé de risquer des bombardiers B-2 Spirit pour frapper les installations souterraines des Houthis yéménites, bien que le Pentagone ait à l’époque affirmé le contraire.
Les sites visés sont puissamment protégés par une défense aérienne équipée de S-400 russes, dont les radars sont capables de détecter et de traquer des avions furtifs. Or, cette défense antiaérienne est restée inactive, ce qui indique un niveau de menace jugé insuffisant par Téhéran.
Enfin, l’armée américaine ne dispose que d’un stock limité de GBU-57, au point qu’une seconde frappe serait très difficile si la première n’avait pas obtenu les effets escomptés.

Tous ces éléments pointent vers une conclusion : les États-Unis n’ont vraisemblablement pas utilisé les fameuses bombes de 13 tonnes GBU-57, mais uniquement des missiles de croisière Tomahawk. Il s’agit de frappes minimales pour des effets limités, n’appelant pas de riposte immédiate de l’Iran contre des installations militaires américaines ou des navires de surface de l’US Navy présents dans la région.
L’Iran a d’ailleurs minimisé l’ampleur des dégâts et l’agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a confirmé l’absence d’augmentation des niveaux de radiation à proximité des sites censés avoir été “complètement et totalement oblitérés”.
Quelle sera la réaction de l’Iran à ces frappes? Téhéran ne ripostera vraisemblablement pas sur les américains mais continuera à pilonner Israël, qui a déjà subi des dégâts considérables que les médias se gardent bien de rapporter. Trump ayant agi pour le compte de Tel Aviv, il suffit donc de poursuivre la guerre d’usure sur le proxy sans s’en prendre à son sponsor, comme le fait Poutine avec l’Ukraine. A ce petit jeu là, les Israéliens, qui n’ont aucun profondeur stratégique à part le soutien américain, perdront.
La Maison Blanche et le Pentagone jouent au poker menteur, avec tout le bruit et le blingbling typiques de Las Vegas.
Ces frappes furent une opération conçue pour sauver la face de Donald Trump et les fesses d’Israël, qui a déclenché une guerre sans savoir comment la terminer et qui l’a stratégiquement déjà perdue. Les dégâts infligés par l’Iran – physiques, économiques et réputationnels – sont comparativement bien plus importants que ceux causés par l’État hébreu, qui restent minimes.
Il faut enfin noter l’influence des évangélistes sur la décision de Trump. Ces fondamentalistes protestants, dont l’ambassadeur des Etats-Unis en Israël, Mike Huckabee est le digne représentant, attendent le second avènement du Messie. Ils sont des soutient rabiques de l’Etat hébreu.
Quatre vingt pour cent des Américains ne sont pas favorables à une intervention militaire en Iran, et soixante pour cent y sont fermement opposés. Donald Trump a choisi de ne pas écouter son peuple, tout comme il a rompu le pacte passé avec sa base électorale, qui ne lui pardonnera pas. De même, elle ne pardonnera pas l’humiliation que lui inflige Donald Trump, oscillant sans cesse entre éructations et vantardise pour des résultats inexistants. Le reste de sa présidence pourrait se résumer à des parties de golf.
Johnn Quincy Adams: “America... goes not abroad, in search of monsters to destroy. She is the well-wisher to the freedom and independence of all.” L’Amérique ne va à l’étranger chercher des montres à détruire. Elle est bienveillante et souhaite la liberte et l’indépendance de tous.
Candidat indépendant conservateur à l’élection de 1992 qui obtient 18,9% des voix, causant ainsi la défaite de George H. Bush face à Bill Clinton.
Avocat et activiste, il s’est présenté 4 fois aux présidentielles. Il est accusé par le parti démocrate d’avoir provoqué la défaite d’Al Gore face à George W. Bush en 2000, notamment dans l’Etat de Floride.






