Des bistrots aux réseaux sociaux
Chronique d'une expression publique que certains, à Paris et Bruxelles, veulent de moins en moins libre.
La France a connu – et connait encore – la disparition des bistrots. Ces bars, ces troquets où on se retrouve pour parler de la pluie et du beau temps mais aussi refaire le monde, et surtout la politique. Les bars se posaient et se posent encore un peu là : comme le dernier espace de discussion, de confrontation d’opinions et de débat démocratique “ordinaire”. Un instantané de la démocratie simple, populaire, ouverte mais aussi un lieu de formation informelle de l’opinion publique et de résistance à la verticalité du pouvoir dans une culture française de la parole libre.
Dans les années 1960, la France comptait autour de 200 000 cafés. En 2024, il n’en reste plus que 35 000 à 40 000 selon l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie. On estime en moyenne qu’un café ferme chaque jour.
Leur disparition a depuis longtemps été analysée. Elle est tout à la fois sociologique liée aux changements des modes de vie, à la désertification des territoires ruraux, etc. Economique, les marges faibles ne compensant plus les charges élevées. Réglementaire, puisque sont venues se greffer tout un tas de normes et contraintes.
Place aux cafés du commerce 2.0
La fin des bistrots ? Peut-être mais le lien social restait prégnant. Il s’est donc transformé, a trouvé un autre terreau pour se développer. Pas vraiment dans les bars à vins ou autres bars à chats (l’animal, pas la discussion) mais sur les réseaux sociaux. Les RS ne sont ni plus ni moins que les nouveaux cafés du commerce. Avec leurs bons côtés : une large accessibilité, une diffusion d’informations – à prendre ou à laisser – massive. Et leurs moins bons : la formation à coups d’algorithmes de bulles d’opinions et une polarisation du débat. Et l’absence de convivialité qui faisait le charme des bars traditionnels.
Les bars et les réseaux sociaux sont la même chose. A prendre avec les mêmes précautions. Les rumeurs et autres “fausses informations” ou “désinformations” n’ont pas attendu les réseaux sociaux pour circuler, même si le phénomène, accéléré par la caisse de résonance d’internet prend une toute autre ampleur dans sa rapidité. Jeune journaliste, je me rappelle encore ce conseil, cette consigne maintes fois répétée par mon supérieur: fréquenter les bistrots, là où se faisait et défaisait l’opinion publique.
Aujourd’hui, quoi qu’ils s’en défendent, les journalistes s’abreuvent aux RS. Au moindre écart, à la moindre faute, ils sont aussitôt corrigés par ces mêmes RS. Et c’est une très bonne chose.
Où veut-on en venir ? A l’épisode du “face aux lecteurs” de la Dépêche du Midi d’Emmanuel Macron à Toulouse. La démonstration d’un véritable concentré des liens et intérêts qui rapprochent ou unissent les deux pouvoirs, politique et médiatique. Là, la presse régionale, régulièrement et tacitement conviée à porter la parole présidentielle – Macron ou les autres – à l’orée de grandes échéances électorales. C’est du reste elle-même qui le dit : “le Président veut sensibiliser à ces nouveaux dangers et bâtir un débat public plus apaisé avant l’échéance de 2027.” C’est un fait : le pouvoir médiatique n’est en France, à quelques exceptions près, plus que la courroie de transmission du pouvoir politique.
La dimension familiale du groupe La Dépêche du Midi importe finalement peu. Quant à l’”indépendance” du groupe invoquée par son président Jean-Michel Baylet en introduction au raout présidentiel, elle ne fait pas beaucoup illusion. Le groupe de presse touchant chaque année entre 10 et 20 millions d’euros d’aides d’Etat, directes et indirectes, soit environ 10 % de son budget, ce qui le place en 8e position des principaux bénéficiaires, le doute sera toujours de mise.
Difficile de ne pas voir que Jean-Michel Baylet et Emmanuel Macron partagent la même appétence (sic) pour les réseaux sociaux – outre les sphères du pouvoir politique, Jean-Michel Baylet ayant été ministre du commerce extérieur en 2016-2017. Le premier parce qu’ils éroderaient la confiance des citoyens dans les médias traditionnels (des usines à infox et à propagande, qui leur fait encore confiance?). C’est sur les RS qu’on a le toupet de venir lui porter la contradiction sans le filtre des… médias. Le second… pour les mêmes raisons. Leur autre point commun est aussi d’user abondamment des réseaux sociaux qu’ils dénoncent et voudraient bien cadrer, et d’user aussi d’une certaine forme de communication trompeuse.
Question : est-on dans le registre de la désinformation, la malfinormation, la désinformation ou l’incompétence ?
France Info a ainsi été prise en flagrant délit sur les RS ce 12 novembre pour avoir publié un graphique des intentions de vote pour la présidentielle 2027 erroné. “Corrigé”, le graphique comportait toujours des erreurs.
Le 8 novembre, Emmanuel Macron s’érigeait au rang du champion de la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre. Sauf que la réalité des chiffres est autrement moins glorieuse. Désinformation ? L’Eclaireur vous en parlait là :
[ Climat ] COP et GES : la face cachée des chiffres
Les émissions de gaz à effet de serre ont baissé en France, et c’est plutôt une bonne chose. Ce que ces chiffres ne disent pas, c’est ce qu’il y a derrière ces pourcentages. Et la réalité est nettement moins glorieuse.
Il s’agit donc de “reprendre la main”, sur les contenus et usages des réseaux sociaux. Ce sont les mots d’Emmanuel Macron. Dans le droit fil du Digital Service Act (DSA) européen, dont la France est, tenez donc, une des principales instigatrices.
🚨 TWITTER FILES – FRANCE
De nouveaux documents des "Twitter Files" révèlent une coopération active entre Emmanuel Macron, des parlementaires et des ONG liées à l'État, visant à forcer la plateforme sociale la plus influente au monde à censurer des discours parfaitement légaux et à orienter la "modération de contenu" mondiale de Twitter pour contrôler le récit public.
Il s’agit ni plus ni moins que de censure, habillée sous d’hypocrites oripeaux. La protection des mineurs invoquée, ici sous la forme d’une majorité numérique à 15 ans, est nulle et non avenue. Tout le monde sait que les plus jeunes visés par le président de la République accèdent aux écrans et aux réseaux via leurs parents – sans parler de l’usage du VPN. Quant à la vérification d’âge obligatoire, elle a toutes les chances de se heurter au règlement général sur la protection des données (RGPD). RGPD que, curieuse coïncidence, la Commission européenne entend, sous couvert de simplification, réformer.
Ce même 12 novembre, alors qu’Emmanuel Macron tentait une énième fois de tordre le cou à la liberté d’expression en France, Bruxelles annonçait sa nouvelle initiative : le “bouclier européen" de la démocratie”. Des fous qui tournent en rond dans une pièce capitonnée.




![[ Climat ] COP et GES : la face cachée des chiffres](https://substackcdn.com/image/fetch/$s_!P-Aa!,w_280,h_280,c_fill,f_auto,q_auto:good,fl_progressive:steep,g_auto/https%3A%2F%2Fsubstack-post-media.s3.amazonaws.com%2Fpublic%2Fimages%2F868cc462-2e1d-41af-9d1f-b5d82fe31438_1800x1374.png)

Et c'est encore la gauche molle qui est à la manœuvre pour imposer cette censure! Bon, c'est sûr que la position de Macron et de l'E-M de l'UE sur l'Ukraine (par exemple) devient indéfendable. Comme par définition nos crânes d’œuf ont toujours raison, il faut bien interdire les médias (Russes?) qui, par leurs nouvelles, annoncent la défaite prochaine de l'Ukraine, de l'U-E et de l'OTAN face à l'armée russe sinon, on verrait qu'ils se sont trompés. Ce qui pourrait gêner la réélection d'un Macron bis au prochain rendez-vous. Pourtant, tout a été minutieusement réglé avec le seul candidat dangereux (Le Pen), comme (un peu) ce qui s'est passé avec Fillon!
Comme je l'écrivais nous sombrons dans une URSS: même les voyages en Russie sont maintenant interdits! En effet, il ne faudrait pas que des Européens se rendent compte de l'état réel de la Russie, en le comparant au nôtre, ils risqueraient de pleurer. Si personne ne bronche, le système finira par être tellement verrouillé qu'on ne pourra plus en sortir.