Donald Trump, roi de l’impro ou stratège de génie? Alors que son discours de Riyad fait dire à certains qu’il vient d’infléchir sa politique vis-à-vis de Netanyahu, difficile de dégager une ligne directrice claire. Alors qu’à l’instar du reste de l’Occident il s’acoquine avec Al Jolani, le djihadiste d’Al Qaeda et de Daesh aujourd’hui au pouvoir à Damas, n’est-il pas en train de céder à la Turquie d’Erdogan dont l’expansion militaire est financée par le Qatar?
Les néoconservateurs détiennent-ils encore le pouvoir à Washington malgré les purges dans les agences de renseignement et le département d’Etat ainsi que la suppression de USAID?
Essayons d’y voir plus clair avec Douglas Macgregor, colonel à la retraite de l'armée américaine et ancien haut conseiller du Pentagone. Vous trouverez ci-dessous une transcription en français de notre entretien.
L'Éclaireur - Colonel, merci beaucoup d’avoir pris le temps de nous parler à nouveau. J’aimerais commencer par votre analyse du discours de Trump à Riyad. Certains commentateurs y voient un changement par rapport à la doctrine traditionnelle de la politique étrangère de Washington. S’agit-il vraiment d’un tournant ou d’une simple manœuvre ?
Col. Macgregor - Je penche pour une manœuvre plutôt qu’un véritable changement, mais il faudra attendre pour en être certain. Trump a récemment modifié ses positions si rapidement qu’il est difficile de suivre. Certains y voient un coup de génie, estimant que l’ambiguïté stratégique joue en notre faveur. Je ne suis pas d’accord. Le monde attend des États-Unis une certaine stabilité et cohérence. Je ne vois aucune preuve d’une stratégie claire, seulement du chaos et des décisions impulsives. J’espère me tromper, mais jusqu’à présent, rien ne vient le contredire.
L'Éclaireur - Le discours de Trump suggère-t-il qu’il pourrait empêcher Israël d’utiliser la puissance militaire américaine pour ses propres objectifs, ou ai-je mal interprété ?
Col. Macgregor - Certains interprètent ainsi, mais je ne tirerais pas cette conclusion hâtivement. Tous les présidents américains qui ont eu affaire à Netanyahu le détestent. Il exerce une influence bien plus grande sur le Sénat et la Chambre des représentants que Trump. Supposer un abandon soudain de la politique pro-Israël est prématuré ; elle reste solidement en place. La visite de Trump à Riyad vise en partie à réparer les dégâts causés par sa guerre commerciale, lancée de manière imprudente contre tout le monde – alliés, amis et concurrents. Traiter tout le monde de la même manière est une erreur.